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Mongolie : comment détruire l'économie d'un pays.
--> Un exemple typique de ce qu'il ne faudrait jamais faire

Par goût, j’aime les grandes étendues, presque vierges, libres de constructions, où le vent peut s’en donner à cœur joie, caressant le visage de l’homme, mais l’obligeant aussi à se courber ou à se protéger de la morsure du froid qu’il accentue. La Mongolie des quelques reportages que j’ai vus, avec ses steppes infinies, vertes, brunes ou blanches, son désert, la solidité  et l'intérieur accueillant de ses yourtes (gers ou ghers), la joie de vivre, la fierté et la vie simple de ses habitants, a aiguisé mon désir de faire, un jour peut-être, le voyage. Mais ne sera-t-il pas déjà trop tard? Trouverai-je ce pays encore tel qu'on l’a décrit ? Car la Transition vers l’économie de marché de la Mongolie est vraiment l'exemple typique de ce qu’il ne faudrait jamais faire.

 

Imaginez un peu ! Un pays de steppe froid et semi-aride vivant de l’agriculture mais surtout de l’élevage nomade, qui jusqu’à la fin des années 80 (au moment de l’écroulement du système soviétique) produisait assez de nourriture pour être autosuffisant, mais qui, aujourd’hui, importe 80 % de ses besoins en nourriture de la Chine, de la Russie et d’ailleurs….

Il n’est pas courant d’avoir des nouvelles de ce pays du coeur de l’Asie, hors des circuits habituels de l’information mondiale. Mais cette fois-ci, c’est la « Caravane Populaire 2004 pour la Souveraineté Alimentaire », qui nous en donne.  Partie le 31 août de la Malaisie, elle traversera 13 pays d’Asie et se terminera fin septembre au Népal. Et bien, le convoi qui est passé par la Mongolie le 5 septembre nous renvoie une image catastrophique.

A la fin des années 80, il y avait 53 exploitations agricoles d’Etat, 255 coopératives d’Etat et 20 unités de production de foin. La Mongolie soviétique, c'est évident, n'était pas un pays riche car il s’agit toujours d’une terre difficile,  et ceci depuis toujours : une série de hauts plateaux de steppes qui s’élèvent en chaînes montagneuses au nord et à l’ouest, et descendent doucement au sud vers le désert de Gobi, avec environs 2.500.000 habitants sur un territoire grand comme trois fois la France.  Cependant les exploitations et les coopératives d’Etat produisaient du lait, de la viande sèche et de la nourriture en quantité suffisante,  pour tout le monde. Les bergers nomades menaient leur vie plus ou moins encadrés dans les « soviets des clans » (c’est comme cela qu’ils les appelaient), l’Etat organisait le système de ramassage et de transport vers les villes de leurs produits, fromages, peaux, viande.  La « transition vers l’économie de marché » des années 90 a bouleversé tout cela, et désormais, même les plus acharnés du libre-échange reconnaissent que le peuple mongol y a perdu au change.

 

Imaginez un peu la recette-miracle du FMI (Fond Monétaire International) qui se résume au mot « privatisation », appliquée à la steppe et à l’élevage nomade ! Le réseau de ramassage  et de distribution des produits de l’élevage a été démantelé, le bétail des exploitations collectives (bovins, moutons, chèvres, yaks, chèvres cachemire et chameaux) a été redistribué. Le mot d’ordre « mettez-vous à votre compte » a tout d’abord séduit beaucoup de monde. Le nombre des éleveurs a augmenté, mais la difficulté des transports rend l’élevage dans les steppes les plus éloignées peu rentable, et très coûteux l’apport des marchandises nécessaires ainsi que de tous les services publiques essentiels. Si bien que la grande partie des éleveurs s’est concentrée dans la région de la capitale, Oulan-bator, sur des terrains vite érodés par l’excès de pâturage. On a bien redistribué le bétail, mais pas les terres, qui sont restées propriété publique jusqu’en 2002, quand le gouvernement a approuvé une loi pour privatiser la terre, y compris les prairies où les pasteurs nomades font paître leurs troupeaux depuis toujours. D’après les chiffres recueillis par la « Caravane », sur un peu plus de 76.500 familles d’anciens ouvriers agricoles d’Etat, 31 seulement ont obtenu 12 hectares chacune. Aux autres il reste l’option d’acheter de la terre cultivable à 1.000 dollars l’hectare, ce qui est inaccessible pour des gens qui gagnaient 35 dollars en 120 jours de travail.

A ceci, il faut ajouter que les méfaits du « libre commerce global ». En 1997, la Mongolie a adhéré à l’OMC. Elle a donc commencé graduellement à démanteler ses tarifs sur l’importation en général, mais sur la nourriture en particulier. « Maintenant, la nourriture que nous importons à bas prix, y compris les produits laitiers, arrivent en Mongolie à des tarifs presque nuls et ceci est en train de ruiner les produits locaux », se plaint N. Dashhzeveg, chef de l’Union de soutien aux producteurs nationaux, un syndicat rural mongol. « Des pays à l’agriculture arriérée comme la Mongolie ne peuvent pas entrer en compétition avec les USA ou l’Union Européenne ».

 

Il se peut que la « liberté de marché » ait favorisé une partie de la population urbaine, disent les collaborateurs de la "Caravane" , mais aujourd’hui 40% de la population vit sous le seuil officiel de la pauvreté.

(Sources : Il Manifesto)

 

P. S. Ces photos sont maginfiques.

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Vendredi 17 Septembre 2004, 13:21 dans la rubrique "Actualité".