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Le théâtre de la guerre la plus haute du monde pourrait devenir un « parc de la paix »

Il s’agit du glacier du Siachen, entre la chaîne du Karakorum et le Ladâkh, aux confins entre l’Inde, le Pakistan et la Chine. Cette frontière est contestée, tout comme la province du Cachemire. Le Siachen, entre 5.480 et 6.700 mètres d’altitude, se trouve à l’extrême nord de cette région tourmentée. Sa position inaccessible et pas particulièrement stratégique (les trois pays ont d’autres frontières communes) en avait fait une sorte de terre ignorée, jusqu’à l’arrivée, en 1984, de la première expédition d’alpinistes autorisée par le Pakistan. L’armée indienne décida alors d’y transférer des hommes et du matériel en organisant un grand pont aérien, et construisit des places fortes le long du tracé hypothétique de ce qu’on appelle la Ligne de Contrôle (la ligne de cessez-le-feu de 1949, devenue, de fait, une frontière.) L’armée pakistanaise répondit en faisant de même. Il y a donc plus de dix-huit ans que le Siachen est le glacier le plus militarisé du monde. Mais maintenir des troupes et du matériel à cette altitude coûte très cher, en argent et en énergie : il n’est pas surprenant que la plupart des blessés et des victimes des deux côtés (15.000 environ depuis le début), ne soit pas attribuable aux tirs d’artillerie presque quotidiens contre « l’ennemie », mais plutôt (à 97 %) à l’altitude, au mauvais temps et au froid de cette vie impossible à des températures de 40 à 50° en dessous de zéro sur un terrain hostile. Du côté indien, on calcule que maintenir une machine de guerre sur ce glacier coûte environ 1 million de dollars par jour.

 

Si finalement on démilitarisait le Siachen, proposent les signataires d’un appel publié sur Sanctuary Asia, un magazine écologiste de Bombay, ce lieu pourrait devenir une zone protégée, un « parc de la paix ». Cette proposition a déjà été faite à plusieurs à reprises (depuis 1986 il y a déjà eu 7 phases de négocitiations dont la dernière, en 1998, faillit aboutir), et pour reprendre cette idée, il n’est pas nécessaire d’être pacifiste, il suffit d'estimer les coûts et le peu d’importance stratégique de l’endroit.

 

Il y a quelque chose de surréel dans cette guerre de position sur les glaces éternelles. Il faudrait que les militaires se retirent, de part et d’autre et en même temps, grâce à un de ces gestes que dans le langage des négociations on appelle « construction de la confiance » (confidence building). Dans un certain sens, c’est ce que proposent les signataires de l’appel qui est également en train de circuler sur les réseaux pacifistes et  écologistes internationaux. La proposition a été  relancée au mois de juin au cours d’une conférence régionale de l’Union mondiale pour la conservation de la nature (Iucn) et de la Fédération mondiale des parcs : « Vu que cela part d’un processus de normalisation et d’une mesure de construction de la confiance, nous demandons aux gouvernements de l’Inde et du Pakistan d’instituer le « Parc de la paix du Siachen », afin de protéger et restaurer l’environnement spectaculaire habité par de nombreuses espèces menacées comme, entre autres, le léopard des neiges.

 

Parmi les promoteurs on compte des écologistes comme Bittu Sahgal (directeur du Sanctuary Asia), des activistes pour la paix comme l’ex amiral de la marine indienne Ramu Ramdas, le Mouvement indien pour le désarmement nucléaire, la Coordination des ONG pakistanaises, l’Institut pour la politique d’un développement soutenable (Pakistan), etc… La liste est longue, elle comprend des personnes et des organisations en Inde et au Pakistan, mais aussi dans le monde entier, sans oublier les amants de la montagne. Tous désirent créer un mouvement d’opinion en faveur de la « Siachen Peace Park Initiative », et font remarquer que ces sommets sont incroyablement riches en vie : le léopard, l’ours brun, divers herbivores et les plantes dont ils dépendent.

 

Un glacier, cependant, est un écosystème extrême, et l’intrusion des armées est dévastatrice : les militaires laissent des déjections humaines (1000 kg par jour seulement du côté indien) qui à ces températures ne se décomposent pas facilement, une pollution chimique (huiles et lubrifiants), ainsi que des emballages et ordures de toutes sortes et des débris de ferraille laissés sur place ou mis dans des bidons qui sont ensuite jetés dans les crevasses (plus de 4000 par an), sans parler du matériel de guerre abandonné, non explosé, qui n’atteint pas son but. Les produits de la pollution finissent par arriver dans les cours d’eau qui descendent du glacier, puis dans le fleuve Shyok qui se jette dans l’Indus, et c’est de cette eau-là dont dépend la vie de millions de personnes dans les vallées.

 

Ceux qui soutiennent cet appel pensent donc qu’il serait dans l’intérêt des deux nations de démilitariser, procédant ensuite à un grand nettoyage. Pour elles, il s’agit d’une simple question de bon sens.

(Sources : Il Manifesto et www.montagna.org)

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Mardi 12 Août 2003, 19:32 dans la rubrique "Actualité".

Commentaires et Mises à jour :

Lucanus
14-08-03 à 19:53

Nous pouvons constater que la bêtise humaine est non seulement sans frontière mais qu'elle a pris de l'altitude dans certains endroits. Pauvre monde !