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La honte

Je ne sais pas s’ils refusaient de payer le « pizzo* » ou la « mazzetta* » à cette brave organisation qui, au sud de l’Italie et même un peu partout dans le monde désormais, vous « protège » contre votre gré, ou s’ils ne payaient pas assez ou pas au bon clan, mais le fait est qu’ils ont eu droit, il y a environ quinze jours de cela et comme nombreux de leurs collègues pas assez dociles, à une bombe incendiaire qui, de nuit, a fait sauté les vitres du voisinage et brûlé tout ce qu’il y avait dans leur boutique. Mais qu’on ne se fasse pas de souci, après avoir nettoyé tant bien que mal, ce matin les jumeaux ont rouvert leur épicerie. P. est de nouveau dehors en train de veiller à ce que les gens ne touchent pas aux fruits et légumes, et G. au comptoir des fromages et de la charcuterie, et à la caisse. Les clients vont revenir comme si de rien n’était, car tout le monde sait de quoi il s’agit. Et pourtant, moi, je me suis demandée comment il est possible qu’ils ne soient pas écrasés par la honte. La honte de quoi, me direz-vous ? La honte de ne plus avoir d’autre choix que celui d’aller ajouter leur nom à la liste de ceux qu’on oblige à la soumission ou à la concussion. Et la police dans tout cela….. ???? Et bien... ?????  Et puis, il est probable que personne n'a rien vu.

 

La honte, quel drôle de sentiment ! Bien sûr, on peut l’éprouver suite à un comportement personnel peu glorieux, indigne, à nos yeux, de la personne que nous croyons être. Mais elle vous arrive le plus souvent quand, sans être coupable, on fait piètre figure aux yeux de tous, celle du faible qu’on ose attaquer, qu’on ose confondre, dont on ose se moquer, à qui on ose faire une réflexion. La brûlure est vive, profonde, sanglante, l'humiliation est dévastante, et la colère qui s’y attache n’arrange pas les choses car en plus on a honte d’avoir honte et d’être écrasé par un sentiment injustifié, dont on ne veut pas, qu’on ne sent pas sien, qu’on refuse du plus profond de soi, et que, bien entendu, on n'avouera à personne... Jusqu’à ce que le temps fasse son œuvre, que le voisinage fasse à nouveau comme si de rien n'était, qu’on puisse de nouveau passer pour ceux à qui on n’ose pas s’en prendre, avec qui ça ne prend pas, retrouver le respect des autres en quelque sorte… Jusqu’à la prochaine fois.

 

Très sud-sud mon billet d’aujourd’hui…


*  Termes italiens pour désigner le racket.

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Ecrit par ImpasseSud, le Mardi 26 Juillet 2005, 14:12 dans la rubrique "Actualité".
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Commentaires et Mises à jour :

Nicole
29-07-05 à 22:10

Il y a une chose qui s'apelle l'auto-censure, ou le black-out médiatique.

Les pays (dont le Portugal) sans vendeta ou crime organisé aprécient.

Bon courage !


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ImpasseSud
30-07-05 à 15:02

Re:

Bienvenue Nicole !
Auto-censure ou black-out médiatique sont des appellations récentes qui ne vont pas avec la réalité dont je parle, bien plus ancienne, et dont le vocabulaire est spécifique, non pas italien, mais tiré des dialectes locaux. Ici il s'agit de quelque chose qui broie tout, d'un cul-de-sac où tu ne décides plus de rien, d'un système qui conditionne les sentiments, les comportements, les coutumes, l'évolution et toutes les décisions d'une société. Ce n'est pas pour rien qu'on la surnomme "la pieuvre".
Je crois que les gens des pays où cela n'existe pas ne comprennent pas qu'on puisse accepter cet état de fait sans se rebeller et éprouvent même un certain mépris envers les victimes. Que n'ai-je pas déjà entendu ?!?! Moi, j'ai mis assez longtemps à comprendre. Mais contre cet état de fait, un individu, une famille toute entière qui se serre les coudes ou même un groupe de personnes sont complètement impuissants ou presque. S'ils se rebellent, ils ne font que risquer leur vie et celle de leurs proches pour rien ou pour un trop peu bien vite disparu. Le seul moyen d'éradiquer cette plaie, ce serait d'arriver au soulèvement massif de toute la population... Chose impensable dans des régions ou l'Etat brille par son absence et ne réapparaît qu'au moment des élections.

En tout cas, merci pour ce commentaire :-)

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