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Lessing Doris, « Dans ma peau, 1919-1949 » (1992)
--> Dans la peau des femmes

En ce 8 mars 2008, pour toutes les femmes qui passent par ici, je me bornerai à émettre un seul souhait : si ce n’est pas encore fait, qu’elles lisent « Dans ma peau, 1919-1949 », l’autobiographie des trente premières années de Doris Lessing, Prix Nobel de littérature 2007, ne serait-ce que pour se réveiller, pour faire la différence avec l’effarant conformisme consommateur, carriériste et sexuel qu’on porte actuellement aux nues comme exemple de la réussite féminine, mais qui conditionne et même emprisonne les adolescentes et les femmes jeunes et moins jeunes d’aujourd’hui tout aussi étroitement et tout aussi sûrement que ne le faisaient la stricte morale de façade et les interdits de nos arrière-grands-mères.

 

La première moitié du XXème siècle ; deux pays, la Rhodésie du Sud puis l’Angleterre ; deux continents, l’Afrique et l’Europe ; deux mariages, trois enfants. La tradition européenne, le paysage africain et la récession des années 30 ; l’émigration britannique, la Seconde Guerre Mondiale vue d’Afrique; les cultures en conflit, l’apartheid, une précoce prise de conscience des flagrantes et profondes injustices d’une société artificielle et les mouvements qui l'appuient ; tout cela sert de toile de fond à l’éclosion d’une rébellion, dès le plus jeune âge, au détachement instinctif de la famille à travers, non pas une rupture, mais une progressive formation individuelle, sexuelle, littéraire et politique à laquelle elle ne veut renoncer à aucun prix ; puis, enfin, le départ pour l’Angleterre avec un premier roman dans sa valise.

 

Dans une immédiateté lancinante qui plonge dans l’oralité, dévoilant son extraordinaire énergie créatrice et émotive, Doris Lessing parle d’elle-même et des autres, de sa vie intérieure et de cette Afrique qui a forgé sa personnalité de femme et d’écrivain. A quel moment de son récit écrit-elle que la plupart des femmes, durant l’arc de leur vie, n’utilisent que le dixième de leur potentiel ? Pour ma part, j’en suis persuadée. Quel gâchis ! « On n’a qu’une vie », répète-t-on trop souvent aujourd’hui comme si on venait de faire une grande découverte, mais surtout pour vous pousser à la consommation et à l’égoïsme. Je pense au contraire que même si nos vies n’ont ni la variété ni l’ampleur de celle de l’auteur, même si elles sont pleines de parcours obligatoires, entre suivre docilement le courant ou s’adonner à la provocation, à la rupture ou au désespoir, chacune d’entre nous a toujours devant soi un certain nombre de choix propres à satisfaire son moi intérieur, qui, faits avec critères, finissent par révéler des capacités et des horizons insoupçonnés jusque-là. C’est ceux-là qu’il faut toujours essayer de faire et c’est justement ce que nous suggère ce livre magnifique qui se lit comme un roman.

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Samedi 8 Mars 2008, 11:23 dans la rubrique "J'ai lu".

Commentaires et Mises à jour :

gilda
08-03-08 à 15:53

        Je connais d'ailleurs deux dames et qui pourtant ne sont pas n'importe qui (donc on aurait pu croire que financer sur leur nom un projet en attirait plus d'un) qui ont sur ce thème, de cette oppression actuelle et particulière des femmes, écrit un scénario ... qui n'a (que je sache) pour l'instant pas trouvé preneur.
Le sujet est encore tabou.

PS : Cela dit aux femmes aussi de refuser d'intégrer les contraintes qu'on leur colle. Pourquoi serait-ce une obligation de suivre une mode vestimentaire ? Pourquoi les cheveux blancs seraient-ils méprisables ? Et les rides, qu'est-ce qu'elles ont de mal ? etc.

 
ImpasseSud
09-03-08 à 15:43

Re:

Les tabous, Gilda, sont omniprésents dans notre société actuelle qu'ils sont même en train de submerger. As-tu remarqué que dans le brouhaha assourdissant d’une société où tout le monde parle sans arrêt pour soi-disant "s'exprimer", on cultive au plus haut point l'art de répondre à côté qui tue toute communication et porte à la solitude ?

Face au nombre de femmes "in" mais surmenées, surchargées, objets et machines à être consommées et à consommer, maltraitées, tyrannisées par leurs enfants qu’elles n’ont plus la force d’éduquer, sous antidépresseurs parce que mal dans leur peau, dans leur corps ou zombies du système, qui n'ont plus une once d'originalité, une "vraie" minute pour elles-mêmes, pour leur famille ou leur entourage, je me demande comment il est possible que personne ne réagisse, ne sonne l'alarme. Pas même les féministes qui ont complètement perdu de vue les urgences.

 
Sally
06-04-08 à 02:37

«Je pense au contraire que même si nos vies n’ont ni la variété ni l’ampleur de celle de l’auteur, même si elles sont pleines de parcours obligatoires, entre suivre docilement le courant ou s’adonner à la provocation, à la rupture ou au désespoir, chacune d’entre nous a toujours devant soi un certain nombre de choix propres à satisfaire son moi intérieur, qui, faits avec critères, finissent par révéler des capacités et des horizons insoupçonnés jusque-là. C’est ceux-là qu’il faut toujours essayer de faire...»
Merci Impasse Sud, ce paragraphe me parle beaucoup, à ce moment-ci de ma vie.

 
ImpasseSud
06-04-08 à 10:33

Re:

Merci Sally pour ce partage. Je suis en train de terminer "Oasis interdites" d'Ella Maillart. J'en parlerai sans doute bientôt. Encore une femme extraordinaire qui, cependant, à la fin de sa vie ne se retenait pas comme telle, mais simplement comme quelqu'un qui, justement, a pu, grâce à l'écoute de ses propres qualités, saisir ce que la vie lui offrait.

 
Incognito
07-04-08 à 08:00

Lien croisé

Le monde de Sally : "Qu'ai-je-fait du reste de ma nuit, pour ne me recoucher qu'à près de 6h du matin, les jambes gelées? Eh bien, je cherchais à savoir où est rendue Han Suyin, pour découvrir par ricochet Clara Malraux, et André, l'homme derrière le personnage, en terminant par Impasse Sud, et ce qu'elle a écrit au 8 mars dernier, en commentant l'autobiographie de Doris Lessing. Pour me situer exactement dans ce paragraphe:"