Un des chapitres le plus fascinant du livre d’Eric Schlosser, « Fast-Food Nation, The dark side of the All-American Meal» ("Les empereurs du Fast-food : le cauchemar d’un système tentaculaire"), un des derniers titres de la vaste littérature sur McDonald’s et ses semblables, est dédié à l’industrie des arômes, anneau fondamental et caché de la fabrication des aliments. 90% de ce que les Etats-uniens dépensent pour se nourrir sert à acheter de la nourriture confectionnée, en boîte, surgelée, précuite ou déshydratée. Et vu que ces techniques enlèvent du goût aux aliments, il est nécessaire de le réintroduire avec des arômes naturels ou artificiels (la différence entre les deux est souvent arbitraire car elle dérive du mode de préparation et non pas des substances chimiques qu’ils contiennent). L’industrie étasunienne des arômes a un rendement d’un milliard et demi de dollar par an et est concentrée dans le New Jersey, où sont fabriqués les deux tiers des additifs aromatiques vendus aux USA, mais sans son aide, les hamburgers n’aurait pas ce goût de fumée, le yogurt à boire, celui de la fraise, et le dentifrice, celui de la pomme.
Le processus de base est identique qu’il s’agisse des arômes ajoutés aux aliments ou de ceux utilisés dans les produits cosmétiques pour créer des odeurs particulières. Vu qu’une grande partie des saveurs d’un aliment dérive de son odeur et des gaz qu’il libère quand nous le mastiquons, le but des « arômatiseurs » est de trouver et de fabriquer l’odeur juste. Avec les biotechnologies, ils réussissent à créer des odeurs toujours plus « réalistes » et plus « particulières » (par exemple : beurre frais, beurre au lait cru, crème de beurre parfumée, super concentrée et épaisse, en forme liquide, ou sèche.)
La formule des arômes et les entreprises qui les utilisent sont top secrets. La liste des ingrédients pour créer un arôme artificiel à la fraise, par exemple, remplit la moitié d’une page du livre. Les odeurs – auxquelles la mémoire est liée par un double fil (les madeleines de Proust) – sont peut-être l’arme la plus puissante que possède l’industrie de l’alimentation pour rendre les consommateurs fidèles. Vu que les saveurs de l’enfance laissent une empreinte indélébile, les cibles les plus recherchées par les chaînes de fast-food sont les enfants.
L’arôme créé, il faut vérifier la « sensation » qu’il produit dans la bouche. Pour cela, on recourt à la rhéologie, une des branches de la physique qui étudie le comportement des matériaux. Des « bouches mécaniques », en mesure d’élaborer des données provenant de différentes sondes, mesurent les propriétés rhéologiques d’un aliment : son écoulement, son point de rupture, sa densité, son croquant, sa masticabilité, sa viscosité, ses consistances grumeleuse et gommeuse, sa ductilité, ses propriétés glissantes, son poli, sa douceur, son humidité, son jus, son pouvoir de s’étaler, son élasticité et son adhésivité. Et ensuite ils peuvent l'appeler pommes frites ou autre !
Et maintenant, si vous achetez du pré-cuisiné, du surgelé ou des conserves, bon appétit ! Moi, j’ai tout à coup envie d’aller chiper une poire ou une pomme bien mûre sur un arbre abandonné. Est-ce que j’en reconnaîtrai le goût ?
Commentaires et Mises à jour :
( triste monde moderne )
Personnellement, je ne me reconnais pas dans ces usines à bouffe appelées "Fast-Food ", car j'ai dû y aller 4 fois en dix ans. La seule chose que je trouve bien c'est qu'ils respectent les non fumeurs. Comme je l'ai déjà dit en caricaturant:Déposez vos chiens au "mac-dog " et allez déjeûner dans un restaurant c'est plus sain. Un hamburger pour moi est symbolisé par une semelle entre deux éponges...!
Quand je cuisinerai prochainement au feu de bois de couleur, mon poulet élévé au maïs dans mon poulaillier, je penserai à cet article sur toute cette tambouille artificielle...
bon appétit !
Re:
Parapapaf, .... et en plus, je suis sûre que tu n'aimes que cette marque-là, et pas une autre! Tu es donc un pur produit de notre époque. :-)))
C'est sans doute parce que tu ne sais pas faire une vraie purée ou que personne ne sait te la faire, car je connais des jeunes de vingt ans qui, tout en ayant goûté la mousline, préfèrent largement le produit original. La vraie purée, ça ne se fait pas avec n'importe quelles pommes de terre. ;-)
De toute façon, des goûts et des couleurs......
Re:
Pierre, ici il ne s'agit pas seulement des MacDo et autres, mais d'une grosse partie de ce qu'on trouve dans les supermarchés, comme conserves, surgelés et précuits. Nous n'en sommes pas au niveau américain, mais quand même.....
Bien qu'il me semble déjà sentir le fumet de ton poulet élevé en liberté et au maïs, et cuit sur un feu de bois, peux-tu me dire ce que c'est que le "bois de couleur"?
Re: Re:
Tout est permis dans un monde où la nourriture est totalement dévalorisée. Comme, aujourd'hui trouver une bon boulanger est mission impossible, manger sainement relève d'une bonne bourse bien remplie et de la proximité de produits sains, et encore...
Peut-être est-ce à cause de cette bouffe que je suis malade comme un chien ce week-end, d'ailleurs....
Re: Re: Re:
Tout à fait d'accord avec toi, surtout en ce qui concerne la bonne bourse. On dirait que la diffusion en masse des produits qui peuvent mettre la nourriture à la portée de tous a donné libre cours, pour ne pas dire encouragé, toutes les manipulations. Je me souviens encore du moment (mais je n'arrive pas à y mettre une date) où les premiers colorants ont fait leur apparition. Certains d'entre eux étaient nocifs et, si je me souviens bien, des lois avaient été votées pour obliger les fabriquants à en indiquer la présence en rouge sur les étiquettes : les services de consommateurs avaient publié et mis en circulation des listes de colorants avec leur degré de nocivité. En conséquence directe, cependant, on avait vu apparaitre des aliments qui affichaient en gros "sans colorants", dont le produit, bien entendu, était plus cher.
Malheureusement toutes les mesures qui sont prises dans ces cas-là, sont très vite contournées par l'avidité des gérants des marchés, et les moindres lois tombent dans l'oubliette. Il en est de meme aujourd'hui.
Et puis, je voudrais bien connaitre le pourcentage des gens qui lisent, à chaque fois qu'ils font leurs course, tout le blabla des étiquettes. Pour un meme produit, il se peut qu'il change d'une fois sur l'autre. Pour ma part, je dois avouer que je ne le fais pas, c'est déjà assez harassant de faire ses courses. Et je suis sure que le facteur "lassitude" entre également dans la ligne de raisonnement des "empoisonneurs", car rien ne leur échappe quand il s'agit du "profit".
Sacha, en attendant, guéris vite!
Re: Re:
Je sais, ImpasseSud, qu'il n'y a pas que les Mc Do qui servent de l'artificiel, mais c'est terrible d'avoir vu débarquer, comme partout dans le monde, ces spécialistes de produits rapides sur mon île où la cuisine est très équilibrée. Il est vrai que les US savent aussi vendre du rêve!
Je dois dire qu'après avoir vécu toute ma jeunesse à Paris, où il fallait toujours manger vite et rapide, mes goûts se sont très vite adaptés aux produits pays dès mon arrivée sur cette île tropicale. Je ne mange que très rarement de conserves, préférant achéter des produits frais au marché. Je pense qu'un mixeur est un outil indispensable en cuisine pour y apprécier les jus de fruits frais, car vu tous les E34xxx qu'ils ajoutent dans les boîtes soit disant 100% naturel, à l'arrivée les vitamines ont rendu l'âme depuis longtemps, noyées dans des conservants, des colorants, des réhausseurs de goût, des anti-oxydants, stabilisants et autres...! Il vaut mieux perdre un peu de temps pour monter une mayonnaise que d'acheter celle en tube ou en pot qui se conserve plusieurs mois, il en est de même pour la sauce de tomates fraîches facile à faire que ces tubes de ketchup ...et la liste serait longue! En fait si on veut retrouver "un peu" de la cuisine ancestrale, il faut reprendre sa place dans la cuisine et éviter de manger du "tout prêt". On ne pourra pas manger du 100% naturel, mais on s'en approchera et beaucoup de maladies dites "modernes" dûes à la mal bouffe, disparaîtront avec!
Pour ce qui est des bois de couleurs, ImpasseSud, ce sont des bois de forêts des hauts de l'île poussant entre 1200 et 2000m. Les "tamarins" qui vont du jaune au rouge brun appartiennent à la famille des acacias. Quelques souches ou branches ramassés au cours d'un pique-nique servent de chauffe marmites à la maison lorsqu'on veut se faire plaisir. Il y a aussi "les baies roses" ou "faux poivriers" qui poussent seuls près de chez moi, où l'on prélève quelques branches tendres verdoyantes pour mettre directement dans le feu. Le parfum entre discrètement par le couvercle de la marmite et je t'explique pas le délice...!
Re: Re: Re:
C'est une peu comme sur le pourtour de la Méditerranée. Il y a encore de nombreuses cuisines d'où s'échappent des parfums qui n'ont rien d'artificiel.
Pour "MOI"
MOI, si tu aimes le McDo..., je te conseille d'aller lire l'article que j'ai écrit sur The Sun of the Web :
Des teenagers intentent un procès à McDonald’s : « il nous a rendus obèses »
Lien croisé
Merci pour votre commentaire et les bois de couleurs qui mettent en bouche votre poulet au feu de bois !!!
je cherche pour un devoir, les causes et les effets de l'alimentation rapide!!! style( fast food).
j'avoue ne jamais y aller ....à lire je n'ai pas de regrets!!!!
Ironie d'un monde toujours plus sophistiqué : nous sommes plus ou moins dépendants d'arômes "artificiels", au point de ne plus reconnaitre les arômes naturels dans certains cas...
Jusqu'où ira-t-on ? Seuls l'avenir et la science le diront...