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Koestler Arthur, « Un testament espagnol » (1938)

Cette histoire vécue entre fin janvier et le 14 mai 1937, publiée en 1938, c’est celle que l’auteur a vécue personnellement dans les geôles espagnoles, mais que Florence Aubenas, Giuliana Sgrena et tous les journalistes qui ont subi le même sort, ont probablement vécue, elles et eux aussi, dans leurs « geôles » iraquiennes. Ici, nous sommes en pleine guerre civile espagnole. L’auteur qui est l’envoyé sur place d’un journal anglais….

 

… mais également sympathisant déclaré des républicains « rouges » encore au pouvoir, assiste à la chute invisible de Malaga le 8 février, et, le lendemain, il est arrêté par les phalangistes de Franco avec qui il avait eu maille à partir auparavant. On le conduit tout d’abord au terrible poste de police de Malaga où il est le témoin visuel et auditif des « passages à tabac » systématiques et des fusillades (5.000 exécutions entre le 8 et le 13 février), et il pense même à se suicider mais sans y parvenir. Il y reste cinq jours, puis il a « la chance » d’être transféré à la prison de Séville où les conditions de vie sont meilleures, en partie à cause de l’absence de méchanceté du personnel pénitentiaire. Persuadé qu’il est en attente de procès, il supporte comme il peut son statut d’« incomunicado » qui le contraint à l’isolement et au dénuement les plus complets. Le 19 février, il apprend qu'il a déjà été condamné à mort à Malaga. Même si, entre hauts et bas, grèves de la faim et autres stratagèmes, il finit par « aménager » sa vie, dès que la nuit vient, il tend une oreille terrorisée vers les rites qui annoncent les exécutions, la liste qu’on dicte au téléphone, la sonnette du prêtre, les portes qu’on ouvre, les cris et les pleurs. Est-ce son tour ?

 

Il est impossible de donner une idée de ce qu’on trouve dans ce livre où il n’y a pas la moindre phrase de remplissage, une bonne partie ayant été rédigée en prison sous forme de journal. « La mort n’est pas redoutable, ce qui fait peur, c’est de mourir » y écrit Arthur Koestler. Pour un prisonnier condamné à mort dont la sentence peut être exécutée à tout moment et sans qu'on l'ait prévenu, tout est là. Ses jours et ses nuits, tout son temps, toutes ses occupations consistent à essayer de tromper, déjouer, oublier cette peur qui le tenaille, et tout est bon pour ruser avec les violentes oscillations de son propre moral, même les pratiques superstitieuses les plus naïves.

 

Tout comme pour nos deux journalistes d’aujourd’hui, Koestler a eu la vie sauve grâce à une intervention extrêmement rapide de son gouvernement qui a eu pour effet de suspendre à temps l’exécution de sa condamnation à mort, et ensuite, c’est grâce aux efforts d’Anglais de tous bords, même de conservateurs qui voyaient d’un bon œil l’insurrection anti-républicaine, qu’il a fini par être libéré. Après coup, Arthur Koestler a compris qu’au-delà de son histoire personnelle, on avait transformé cette affaire en une épreuve de force entre une opinion publique démocratique et le pouvoir d’un dictateur. N'est-ce pas toujours ce qui se passe ou devrait se passer ? Tout à coup je pense à Ingrid Betancourt ? A quel point en est-on ?

 

Ce livre très actuel est à lire : il est important, prenant, il vous sort des idées stéréotypées qu'on se fait généralement de ce type de situation. Et l’être humain, pris dans son ensemble et malgré ses faiblesses, n'y fait pas si mauvaise figure.

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Lundi 13 Février 2006, 18:20 dans la rubrique "J'ai lu".

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