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Un souhait pour 2006

Ces temps-ci je lis beaucoup. Des livres surtout car désormais l’actualité et la presse sont trop uniformes, mensongères et déprimantes. Impuissante face à ce courant dévastateur, je préfère mettre mes réflexions en hibernation, un bouquin à la main. Lové dans un fauteuil profond ou sous sa couette au cœur d’une nuit protectrice, on se sent tellement bien. J’ai donc finalement décidé qu’il était temps de dépoussiérer les livres dont j’ai hérités il y a plusieurs années. C’est ainsi que j’ai commencé par « L’espion aux Yeux verts », un recueil de nouvelles de Bernard Clavel dont je n’avais jamais rien lu. Et, comme par hasard, j’y ai trouvé la formulation d’un désir encore inexprimé pour 2006.

 

En lisant ces histoires qui se passent toutes dans la campagne franc-comtoise, on éprouve tout d’abord une impression de désuet, mais au fur et à mesure qu’on avance le désuet prend des couleurs lénifiantes, et, à la fin, on se demande pourquoi et au nom de quoi notre monde est devenu aussi agressif, alors que dans ces récits dont le but est de nous raconter « la vie » tout est déjà là, jeunesse, vieillesse, joies, douleurs, suspicion, courage, confiance, faiblesse, générosité, perversion, altruisme, bêtise, amour, amitié, désir, rancœur, déception, espoir, colère, fierté, finesse, sérieux, légèreté, réussite, frustration, etc…. Tout cela, cependant, est emballé dans un voile de pudeur.

 

Alors, en 2006, j’aimerais qu’il y ait un certain retour à la pudeur. « Pudeur », voilà un mot qui en fera sourire plus d’un. D’autres penseront que la pudeur d’autrefois n’était bien souvent qu’hypocrisie. Moi, je dis simplement que dans les souhaits que je formule, j’aimerais que disparaissent les trois-quarts des talk-show et tout autre déballage public où les gens, par pur exhibitionnisme ou dans le faux espoir de régler une fois pour toute un compte en suspens, même périmé, ont pris l’habitude d’étaler leur vie privée et leurs propres rancoeurs sous les yeux de tout le monde. Comme s’il existait réellement la moindre issue chaleureuse, confortable ou résolutive à ces extériorisations parfois même violentes !

 

Pour ma part, ces déballages m’indisposent profondément et je pense au contraire qu’ils ne font que réveiller en nous toutes les frustrations grandes ou petites que nous avions oubliées et avec lesquelles il a fallu nous arranger, aiguiser toutes les rancoeurs que nous avions abandonnés derrière nous, redonner forme à toutes les couleuvres si mal avalées. A mon avis l’impudeur ne soulage jamais et ne fait aucun bien, elle ne génère que des sentiments amers et agressifs qui font boule de neige. Par contre, le secret qu’on garde pour soi parce que cela ne fait de tort à personne, les non-dits par respect ou pour ne pas envenimer une situation, les détails des amours et des amitiés qu’on conserve à deux comme un joyau précieux, les désirs auxquels on donne le temps de monter, les frustrations et les échecs qui se digèrent mieux et s’oublient plus vite s’ils ne sont pas de notoriété publique….. De l’hypocrisie tout cela ? Non, pas le moins du monde. Maintenant que tous les tabous sont tombés et qu’on sait qu’on peut tout raconter, même en public, pourquoi, à partir de 2006, ne pas faire le choix inverse de la pudeur retrouvée ?

 

Ces nouvelles sont agréables à lire à tout moment, mais si un jour vous avez besoin d’une pause, lisez-les en vous laissant porter. Vous vous retrouverez bien vite, comme le souhaite Bernard Clavel sur le quatrième de couverture, en train d’écouter les récits d’un conteur dans la douce pénombre des veillées d’autrefois, et vous en ressortirez apaisés.

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Dimanche 15 Janvier 2006, 10:54 dans la rubrique "Bribes perso".

Commentaires et Mises à jour :

Incognito
16-01-06 à 09:53

Lien croisé

info - [I]1898 - J'accuse... : " ... je ne connaissais pas la date exacte de cette publication, mais plutôt son contexte. Cette fois-ci, c'est fait ! :-) Le respect de l'autre, hélas, voilà quelque chose qui se porte assez mal ces temps-ci. C'est un peu ce que je voulais dire ici. "

 
tgtg
16-01-06 à 10:00

Je reprends ici tes mots

C'est si bien exprimé!
les non-dits par respect ou pour ne pas envenimer une situation, les détails des amours et des amitiés qu’on conserve à deux comme un joyau précieux, les désirs auxquels on donne le temps de monter, les frustrations et les échecs qui se digèrent mieux et s’oublient plus vite s’ils ne sont pas de notoriété publique…..

 
ImpasseSud
16-01-06 à 10:13

Re: Je reprends ici tes mots

Alors, si tu aimes ce genre de lecture, je t'encourage vivement à lire ces nouvelles parues en 1973, mais que j'ai un peu de mal à situer dans le temps : années 30 ? années 50 ?

 
Sally
22-01-06 à 15:26

Il y a quelques mois, j'ai lu les quatre tomes de «La grande patience» de Bernard Clavel et je retrouve la même impression que tu décris à la lecture de son recueil de nouvelles. La grande patience se situe dans les années 30-40, jusqu'à tout juste après la Seconde Guerre.
Oui, la pudeur qui nous manque tant, partout, dans les médias écrits comme télévisuels. Comme si la vie aujourd'hui ne se vit et se décrit qu'à grands tapages, caricatures et parodies. Une téléréalité qui grossit les pores de la peau, obnubilant tout le reste. La noblesse du quotidien, des gestes simples semble dénigrée. La pudeur aujourd'hui est synonyme d'anonymat et dans cette décennie de grande visibilité, les déballages servent à se prouver que l'on existe. Dans cette logique, ne pas exister égal vie inutile. Et l'on ne supporte pas, alors on se suicide ou on fait justice sur les autres, ou on fait un grand coup d'éclat, ou encore, on vit par anticipation par des films, violents à souhaits.
Si chacun d'entre nous accomplis avec dignité, sobriété et pudeur ses gestes quotidiens sans égard de l'ombre ou de la lumière, l'équilibre des microcosmes sera préservé et l'ordre du monde aussi.

 
ImpasseSud
23-01-06 à 19:39

Re:

Quelle description ciblée que la tienne!
Toujours suite à un héritage, j'ai encore également le premier tome des "Colonnes du Ciel". Mais je ne l'ai pas encore lu.
Je suis d'accord avec ton programme. Dignité, sobriété et pudeur, j'ai comme l'impression que c'est  devenu ma devise pour cette année.