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A propos de la dette des pays pauvres : Un beau geste ? Sans aucun doute. Mais aura-t-il une utilité ?

Samedi dernier, à Londres, les ministres des finances du G8, c’est-à-dire du monde des riches, ont finalement accepté la proposition britannique de passer un coup d’éponge sur la dette que Bénin, Bolivie, Burkina Faso, Ethiopie, Ghana, Guyane, Honduras, Madagascar, Mali, Mauritanie, Mozambique, Nicaragua, Niger, Ruanda, Sénégal, Tanzanie, Ouganda et Zambia ont envers la Banque Mondiale et le Fond Monétaire International (FMI). D’ici 12/18 mois cette mesure pourrait s’étendre à 9 autres pays (allant de 40 à 55 milliards de dollars). Mais attention! Ils n’ont encore rien effacé car « il s’agit d’une disposition d’annulation, et rien ne confirme que cette dette sera réellement annulée », a expliqué un fonctionnaire de l’UE. L’amnistie est sujette à des conditions liées à la conduite des pays intéressés (qualités de gouvernance et lutte contre la corruption), et en plus, il n’est pas dit que cette opération aboutisse, c’est-à-dire qu’elle améliore les conditions de vie des populations des pays concernés, parce que…

 

… actuellement ces pays ne remboursent rien car ils ne sont pas en mesure de rembourser quoi que ce soit. Leur dette augmente, c'est tout. Ce dont ils ont un urgent besoin, c’est d’une aide directe.

 

Si Gordon Brown, amphitryon et ministre de sa majesté est content ("Nous présentons la plus large déclaration jamais faite par des ministres des finances sur la question de la dette, de l'aide au développement et de la lutte contre la pauvreté"), si le président actuel de l’UE, Jean Claude Junker, est content lui aussi, au sein de la Commission européenne l’optimisme est mitigé : « C’est un geste positif, mais si ce geste était complété par une décision des USA d’augmenter la dépense à l’aide au développement, alors il aurait un grand impact », affirme Amadeu Altafaj, porte-parole de Louis Michel, commissaire pour les aides au développement. Actuellement cette dépense est de 0,25 % de son PIB et ils n'ont pas l'intention de faire mieux. De son côté, l'UE à 25 s'est mise d'accord pour arriver à 0,56 % en 2010 et à 0,7% en 2015, réalisant ainsi une résolution prise... en 1970!

 

Et puis, il y a tous ceux qui font la grimace. « 40 milliards de dollars sont une goutte d’eau quand on pense que la dette totale est supérieure à 1000 milliards », affirme le président des ONG italienne. « Si les gouvernements n’annulent pas l'ensemble de la dette, comment feront les organisations internationales et le système bancaire pour procéder à l’annulation de leur part de dette qui est 5 à 6 fois supérieure à celle des Etats ? » Sur la même ligne, on retrouve la Conférence épiscopale italienne : « Parler de moment historique comme l’ont fait les ministres du G8 est franchement hors de propos et frise même le mauvais goût », car les pays qui sont dans une situation extrêmement difficile sont au moins soixante.

 

Le problème, cependant, ne se trouve pas au niveau du montant mais au niveau de la qualité de la dette, souligne également la Commission européenne. Bruxelles est pour la réduction de la dette au cas par cas, mais contraire à son annulation, parce qu’il y a dettes et dettes : celles qui, au Mali et au Niger par exemple, naissent suite à la désertification, mais aussi celles que les pays font pour l’achat d’armes, les spéculations financières et la corruption. En plus, annuler les dettes risque de favoriser les grandes entreprises et les monopoles nationaux, laissant une fois de plus la population pour compte.

 

Un beau geste, donc ? En toute bonne foi, j’opterais plutôt pour « un premier pas, un désir de bonne volonté» …. un peu médiatique toutefois.

 

(Sources : Il Manifesto)

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Mardi 14 Juin 2005, 16:39 dans la rubrique "Actualité".

Commentaires et Mises à jour :

Anastomoses
16-06-05 à 09:23

Dans cette histoire de dette, il y a beaucoup de communication (dans le sens le moins noble du mot, de publicité quoi) et de bonne conscience affichée. Outre que les sommes en jeu sont dérisoires (juste pour rappel, la dette de la France dépasse maintenant les mille milliards d'euros), il y a des effets pervers à annuler les dettes. L'annulation est une reconnaissance officielle qu'un pays n'est pas solvable et du coup il perd sa crédibilité sur les marchés financiers. Alors qu'il a souvent besoin de nouvelles aides financières, on lui retire son crédit auprès des organismes financiers, tout en lui enjoignant de mener des politiques drastiques en contrepartie de l'annulation.
L'argent prêté à souvent profité aux dirigeants car aucun contrôle n'était effectué sur les sommes prêtées (elles revenaient bien souvent dans les caisses des états prêteurs). Par contre l'annulation dessert souvent les peuples qui la payent par un tarrissement des nouvelles entrées. Certains pays ont d'ailleurs refusé il y a déjàquelques années ce qui est présenté comme une largesse faites par les pays riches.

 
ImpasseSud
16-06-05 à 09:57

Re:

Pour ne pas jouer les "bonnets de nuit", c'est pertinemment que j'ai mitigé ma conclusion, mais nos avis sont tout à fait semblables. Car cette mesure, lancée par un Blair qui cherche à regagner un consensus en Grande-Bretagne, recevra le prochain G8 en Ecosse, désire faire une belle entrée au prochain sommet de l'ONU en septembre prochain et prendra la tête de l'UE le 1er juillet est allée à l'encontre d'un tollé de la part de presque toutes les ONG et associations présentes dans les pays pauvres.

Au sujet du remboursement de cette dette, j'aime beaucoup l'attitude de l'Argentine qui, tout du moins, fixe elle-même ses jalons, et commence même à être suivie par d'autres pays de l'Amérique du Sud.


 
Ysengrin
16-06-05 à 12:27

Re: Re:

Dans le Canard de la semaine, un dessin fabuleux de Lefred-Thouron (je crois) :
"Euphorie dans les 18 pays les plus pauvres" : un homme et une femme, africains, assis dans le désert, au milieu de nulle part :

-  Le G8 a annulé notre dette !
- Champagne !

 
ImpasseSud
16-06-05 à 14:34

Re: Re: Re:

Dommage que ce dessin n'apparaisse pas sur le numéro on-line.

 
Anastomoses
16-06-05 à 15:52

Re: Re:

Remarque, ça marche plutôt bien l'effet d'annonce, car la plupart des médias reprennent sans trop se poser de questions le gros titre sur l'annulation.

 
ImpasseSud
16-06-05 à 16:39

Re: Re: Re:

Comme cela tout le monde se sent "meilleur" : Une vraie pillule de bien-être ! Je viens de lire un article sur Le Monde où, en légende au-dessous d'une photo, on classe les journalistes parmi les gens qui devraient prendre la relève du pouvoir. Je me demande si ce n'est pas déjà fait vu que l'information a perdu sa part d'opposition pour passer aux dogmes.

 
ImpasseSud
10-07-05 à 10:59

Les points de vue des Africains : assez contraires!

- celui d'un Ougandais (en anglais)
- celui d'une Ivoirienne (en anglais)
- celui d'un Nigérian (en anglais)
- celui d'un Angolais (en anglais)
- celui d'un ancien mercenaire Sud-Africain qui vit aujourd'hui en Sierra-Leone (en anglais)
- celui des enfants de Maputo (Mozambique) (en italien)
- celui d'un Congolais (en français) et des tas d'autres articles sur www.fr.allAfrica.com
- Black looks, le blog d'une Nigériane (en anglais)

Tous dénoncent la corruption de leurs gouvernants que l'annulation de la dette ne fera qu'enrichir au détriment du peuple.