Au sud de l’Italie depuis plusieurs années, j’ai été heureuse de retrouver l’origine de la tarentelle dans un bel article publié dans Le Monde, "Italie : dans les Pouilles, le village où la danse fait des miracles", car si ce n’est à travers l’expression qu’on adresse à une personne qui a perdu tout contrôle, - « ti ha forse pizzicato la tarantola ? » -, mes connaissances ne dépassaient pas le stade de la fascination. Détails historiques et légende mêlées, l’auteure de cet article a parfaitement saisi l’essence de cette danse qui, avec son rythme, exorcise non seulement un village des Pouilles et non seulement tous ceux qui auraient été mordus par une tarentule, mais tout le sud de l’Italie, de Naples à la Calabre et à la Sicile, du Gargano, l’ergot dans l’Adriatique, à l’extrême pointe du Salento, le talon de la botte. Un accordéon diatonique, une flute, un violon, une cornemuse, une guitare en plus ici et en moins là, mais partout et toujours d’impérieux tambourins qui imposent aux cantilènes un rythme endiablé, qui envoûtent. Minces feuilles de frêne recourbées en cercle sur lequel on a tendu une peau de chevreau, - avant l’invasion de l’économie chinoise, bien entendu -.
Il pleut, il pleut, il pleut, il pleut…. Voilà plus de deux mois qu’il pleut pratiquement sans que les interruptions dépassent quelques heures, une demi-journée, très rarement une journée. Ce qui est tout à fait anormal à cette latitude et sur les bords de la Méditerranée, où, en hiver, la règle veut que de très belles journées, limpides, ensoleillées et douces, avec les amandiers et les mimosas en fleurs, alternent avec des périodes brèves de violentes tempêtes et de vents déchaînés.
L’éventail n’était pas bien grand : des pigeons mais pas beaucoup ; les mouettes sur la mer, posées en files sur l’eau, en vol ou en plongée ; des hirondelles fidèles à leurs nids (il y a au moins cinq ou six nids sous l’avant-toit de mon immeuble) arrivées au printemps comme chaque année ; et les nombreux moineaux, désordonnés, bruyants, effrontés même, ceux dont les petits en excès tombaient parfois du nid, et qui, du lieu qu’ils avaient élu comme leur domaine, me charmaient chaque matin au petit déjeuner… après avoir parfois laissé, à l’aube, quelques cadeaux sur ma rambarde. Et bien, à part les mouettes qui continuent à lancer leurs sifflements toujours un peu inquiétants, tout ce petit monde-là a disparu, depuis plus d’un mois maintenant.
Certes, vu de près, le village n’est pas beau, avec ses rues mal tracées, ses maisons rarement terminées, les briques encore à nu ou recouvertes d'un crépi fade, les tiges rouillées des colonnes de ciment armé pointées vers le ciel. Heureusement que la végétation est là, vite luxuriante à la moindre goutte d'eau. Ce n’est qu’une de ces excroissances satellite des communes de l’intérieur, cachées dans l'Aspromonte pendant des siècles pour échapper aux incursions sarrasines : « Mamma li turchi ! » s’écrie-t-on encore parfois en riant pour simuler la peur. Probablement nées de la tendance à se rapprocher de la côte, aujourd'hui sûre et plus accessible, et de l’affranchissement progressif de la pauvreté grâce aux émigrés des années 50 et 60 de retour au pays, ne serait-ce qu’un seul mois par an, elles s'égrainent sur cette partie du littoral de la Mer Ionienne où on parle encore un grec local. Ici, nous sommes vraiment au centre de
Premier froid, intense (+ 10 °C !!!), un peu en avance sur la normale pour le sud de l’Italie. En général, les premières tempêtes arrivent début décembre, pendant quelques jours, parfois même très violentes et avec une tramontane qui vous transperce jusqu’aux os. Puis les choses se calment. A Noël, on reste souvent les fenêtres ouvertes, et moi, fille du nord, je trouve même cela terriblement déprimant. Mais, dès que la fin de l’année approche, le thermomètre descend, il arrive même que le froid vous morde les joues et janvier peut réserver toutes sortes de surprises, du plus froid avec quelques flocons épars au plus doux avec le désir de lézarder au soleil.
Pour moi, le symbole de la vie, c’est l’arbre. On peut le planter bien sûr, mais il arrive qu’il croisse spontanément. Si son feuillage est persistant, il se transforme en un point de repère avenant, en compagnon de vie. Que dirait ce vieux chêne s'il pouvait nous raconter son histoire ? Combien de générations de couples a-t-il abrité sous sa proéminente frondaison ? De combien de confidences intimes a-t-il été le témoin ? Combien de rêves y a-t-on fait dans la fraîcheur de son ombre, par les après-midi torrides ? Mais ici, sur les bords de la Méditerranée, le roi, c'est l'olivier, emblème de générosité, fidélité et résistance.
En Italie, au début de l'été, le gouvernement en place, celui de Berlusconi, a donné sans vergogne le conseil aux municipalités qui avaient des problèmes financiers de les résoudre en louant ou vendant le littoral. C’est ainsi qu’on a bien vite transformé en foire d’empoigne la merveilleuse promenade du long de mer de la ville où j’habite, avec de la musique à haut volume jour et nuit, des vendeurs en tous genres, la plage complètement occupée par des établissements balnéaires payants. Certains ont même déplacé les rochers qui en protégeaient une partie de la violence des tempêtes d’hiver. Quand on pense que ce bord de mer, avec sa végétation luxuriante et l’Etna avec son panache en toile de fond, a la réputation tout à fait justifiée d’être l'un des plus beaux kilomètres italiens ! Mais ce n’est pas tout.