C’est la contradiction que nous sommes en train de vivre. Il fut un temps où on produisait des biens de consommation pour répondre à une demande, mais « La tendance veut qu’on ne consomme même plus pour produire », écrit Massimo Fini dans « Il Vizio oscuro dell’Occidente » », « mais qu’on produise sans consommer ». C’est exactement ce qui se passe quand, comme aujourd’hui, 22 septembre,
Depuis quelques semaines, je dois partager ma voiture avec un de mes fils qui en a un besoin impératif. Nécessité fait loi, mais cela ne me plaît pas. J’ai eu ma première voiture à 21 ans, et depuis lors, je ne suis jamais restée sans. Heureusement que c'est provisoire car j’ai l’impression qu’on a rogné ma liberté d'action. Attention, je ne suis pas une esclave de la bagnole. Si je ne suis pas chargée ou si ce que je dois faire se trouve dans un rayon d’un kilomètre, je choisis toujours d’aller à pied, et si je dois tourner une heure pour trouver une place de parking, je change d’horaire ou je m’arrange autrement. Dans mon esprit, il n’existe que deux possibilités : ou bien j’ai une voiture, ou bien je n’en ai pas. Mais si j’en ai une, je prétends qu’elle soit à mon service jour et nuit, que je puisse m’en servir quand j’en ai besoin et quand bon me semble. Ce n’est pas une question de caprice mais de bon sens, car je ne la prends jamais sans raison.
Qu’on lance ce genre d’initiative le dimanche, passe encore. Après tout, il peut être très sympathique de redécouvrir sa propre ville sans trafic, sans rumeurs importunes. Cela donne une impression de liberté, d’espaces réappropriés, mais peut-on réellement croire que ce jour-là on va éviter toutes les particules qui empoisonnent l’atmosphère? Comme si elles disparaissaient du jour au lendemain. Sans compter que de la ville voisine où on circule, il peut souffler un petit vent pollueur.
Lancer cette initiative en semaine, par contre, c’est de la pure provocation. A Rome, on était plutôt furieux ce matin. Combien d’énervement en plus, de rythmes bouleversés, de retards ou d’absences au travail ou à l’école justifiés, de rendez-vous manqués, de voyages annulés, etc… Comme si les centres piétonniers n’étaient pas déjà assez nombreux et la vie déjà bien assez compliquée.
Alors d’un côté on pleure parce que le marché de la voiture ne va pas fort, mais quand on en achète une, il faut qu’on se heurte sans arrêt à des restrictions. Si on veut « vraiment » résoudre le problème de la pollution de l’air, il n’y a qu’une seule solution, revoir le problème à la source, c’est-à-dire du côté des systèmes d’émissions, de la fréquence, de la vélocité, de l'augmentation et de la variété des transports en communs ou des modes de transport alternatifs, de l’organisation des horaires, etc. On le répète depuis des années, mais face à la croissance du nombre des maladies respiratoires et des allergies, face aux caprices du temps, tout ce qu’on propose, c’est une journée sans voiture, de temps en temps. Du folklore à domicile en quelque sorte. Je me demande si plus tard, dans cinquante ou cent ans, on ne se souviendra pas de notre époque comme de celle où on inventait de fausses solutions pour éviter d'affronter les vrais problèmes.
Mots-clefs : Planète Terre, Union Européenne
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Re:
Ton billet ne pourrait pas mieux compléter le mien. Les embouteillages! Ici, heureusement, j'ai le moyen d'y échapper. Je ne sais pas comment font les habitants des grandes villes pour les supporter. Toutes ces heures perdues! Tout cet énervement pour rien qui se transforme en stress ! Et au milieu des gaz d'échappement! Sans parler de l'incidence sur la consommation des litres d'essence!
Quand j'ai commencé à travailler, le chômage étant pratiquement inexistant, le temps de transport requis pour me rendre sur place et la facilité/difficulté pour trouver une place de parking entraient toujours dans ma décision ou mon refus d'accepter un emploi. Ce n'est pas si vieux, mais aujourd'hui ce récit a quelque chose de préhistorique.
En attendant, la société, c'est nous, c'est le reflet de nos choix politiques. Le fait qu'un seul ouragan oblige un état comme les Etats-Unis à aller puiser dans ses réserves de carburants comme on l'a fait après le passage de Katrina, ou que le remède à chaque ouragan se trouve en partie dans l'augmentation de leurs prix à la pompe, n'est qu'un indice de plus de sa fragilité et de son incohérence. Il ne s'agit plus d'un serpent qui se mange la queue. Aujourd'hui, il la dévore. Pourquoi les gens ne le comprennent-ils pas ?
Au niveau individuel, je ne crois pas que la plupart d'entre nous fait tant d'abus. Mais notre société oui, dans tout ce qu'elle produise et que nous consommons légèrement!