Dino Risi, l’un des derniers monstres de l’âge d’or du cinéma italien, vient de mourir à 91 ans. Contrairement à Fellini ou Antonioni qui furent les symboles d’une avant-garde, Dino Risi a été l’un des plus grands maîtres de la comédie à l’italienne de la seconde moitié du XXe siècle. Si son acteur préféré fut sans autre Vittorio Gassman, Jean Paul Belmondo, Jean-Louis Trintignant, Catherine Deneuve, etc. ont joué pour lui. C’est lui qui a lancé Monica Bellucci. Et quelqu’un se souvient-il du Bon Roi Dagobert avec Coluche et Michel Serrault ? Mais venons-en au film.
A la fin des années 60, à l’époque du boom économique italien, Mariano Bonifazi (Ugo Tognazzi), petit juge d'instruction incorruptible dont les sentences tombent « au nom du peuple italien », enquête sur la mort suspecte d’une jolie fille, call-girl des milieux huppés, morte d’une overdose et dont le corps porte des traces d’ecchymoses. Ses soupçons tombent sur Lorenzo Santecito (Vittorio Gassman), riche industriel que rien n'arrête. Les deux hommes ne parlent pas le même langage et entre eux l’incompréhension est totale.
D’un côté le juge, un formidable Ugo Tognazzi, costume classique et cartable consumé d’où dépasse un parapluie, sévère, rigide, incorruptible, à l’intransigeance implacable du réformateur.
De l’autre un époustouflant Gassman, arrogant et cynique comme il convient à un brillant entrepreneur qui fréquente et intrigue dans les palais du pouvoir, qui ne respecte aucune loi, méprise la bureaucratie, la justice, la police, la morale, prêt à éliminer tout ce qui le gène, même son père.
Mais il y a aussi la justice italienne qui croule littéralement sur elle-même, et le peuple italien, avec ses mesquineries, ses ambigüités, sa passion immodérée pour le foot, sa désinvolture face aux règles, son goût pour la flatterie et la confusion, toujours prêt à se vendre pour un peu d’argent.
Lorenzo Santecito est-il coupable ? L’affaire s’éclaircit à la fin, mais c’est le comportement de ce peuple qui finira par faire pencher le plateau de la balance du jugement.
Un très beau film (en DVD depuis peu), absolument passionnant avec ses deux acteurs extraordinaires, étonnement actuel malgré ses 37 ans, parce qu’il suffirait de changer les vêtements et les voitures pour que cette histoire se passe aujourd’hui, avec Vittorio Gassman dans la peau d’un des requins du libéralisme, et Ugo Tognazzi dans celle d’un de ces magistrats maltraités par une droite vorace et privée de scrupule, ou tentés, à force de frustrations idéologiques, d’abuser de leur pouvoir de façon arbitraire. Une constatation un peu amère.
Pour une critique encore plus acérée mais très bien vue, lire ici.
Commentaires et Mises à jour :
Toujours à popos de Dino Risi
Absolument affreux !
Et c'est affreux de se voir rire, te souviens-tu du mec qui veut secourir un blessé dans la rue et qui ne trouve pas d'hôpital qui peut le prendre en charge et qui le re-dépose, là, où il l'a trouvé.
Il me semble qu'il y avait plusieurs réalisateurs pour ce film ?
Re: Toujours à popos de Dino Risi
Il va falloir que je commence à m'organiser, car ici aussi, on en a pour un bout de temps. :-(
Pour en revenir aux "monstres", cependant, en Italie c'est un sujet récurrent, que les scénaristes les plus divers reprennent continuellement parce qu'il ne tarit jamais.
Toujours à popos de Dino Risi