La question que posait Le Monde à ses lecteurs « on-line » le 28 novembre dernier était la suivante : « La création par les députés d’un délit d’interruption involontaire de grossesse commis "par maladresse ou négligence" en cas d’accident de la route ou d’erreur médicale, par exemple, vous paraît-il constituer une protection utile pour les femmes enceintes ou ouvrir la voie à une remise en cause du droit à l’avortement ? »
Pour ma part, quand on commence à tourner autour de l’appropriation d’un fœtus, je tends systématiquement l’oreille. A n’en pas douter, il y a quelque chose qui se cache derrière, car le sort d’un fœtus, hors de la mère qui le sent grandir en elle, du père et des proches quand ils sont au courant et que ça les intéresse, n’a jamais passionné personne. La preuve, c’est qu’il a fallu arriver en 1975 pour déculpabiliser légalement l’avortement, qui légal ou pas légal a toujours existé et existera toujours. On l’a, au contraire, toujours utilisé comme sujet de chantage, pour mettre un frein à l’autonomie des femmes, ou contré par une politique des naissances durant les après-guerres, afin de préparer « la chair à canon » nécessaire à la suivante. Et il faut croire que pas mal de gens pense comme moi puisque la réponse des votants a été de 56,7% pour le oui contre 27,2% pour le non. De toute façon, Perben a presque gagné, et si le Sénat donne son accord l’affaire est désormais dans le sac. On commencera bientôt à mettre un prix sur les foetus.
Cependant, jusqu’à présent, on n’avait encore jamais songé à les mettre en solde. A combien, selon vous, peut-on évaluer un fœtus ? Bien entendu, selon la "démocratie" en cours aujourd'hui, le prix n’est pas le même pour tout le monde. Un fœtus de bonne famille, comme ceux qui pourraient naître chez les Bush, les Berlusconi ou les Aznar, vaut plus que celui d’un de leurs soldats en Iraq, qui à son tour vaut plus que celui d’un Iraquien. Mais revenons à nos moutons.
Et bien, un groupe formé par des députés italiens « de droite ET de gauche » vient de donner la réponse en lançant la motion suivante : toutes les femmes italiennes et étrangères « avec un permis de séjour », même mineures et dont le revenu annuel est inférieur à 50.000 Euros, qui accepteront de porter leur grossesse à terme afin de faire cadeau de leur enfant à une institution publique qui s’occupe de placement et d'adoption, et ceci après avoir renoncé de manière irrévocable à leurs droits, recevront 1.500 Euros.
Même les foetus ont besoin de "papiers". D’ci qu’on les mette "légalement" aux enchères….. Je ne sais pas pourquoi, mais ça me fait penser aux marchés aux esclaves de La Case de l’Oncle Tom. N'est-ce pas un peu ignoble tout ça ?
(Sources : Le monde, Il Manifesto)
Mot-clef : Femmes
Commentaires et Mises à jour :
Re:
Je viens de lire l'article du Monde sur le "ventre des femmes".
Je trouve qu'au delà du ton - ironique, cinglant, juste - il y a là une question de fond : à qui appartient ce "ventre des femmes", sinon aux femmes ? S'il y a homicide involontaire, y aura-t-il également des cas de légitime défense où les foetus pourront tirer sur leur mère, depuis sa matrice, pour l'empêcher de les tuer ?
Derrière ce surréalisme de façade se cache la peur des mâles de ne pas (plus) contrôler la reproduction du clan, voire de l'espèce...
Dans mon article sur le livre de Muchembled, Passions de femmes au temps de la Reine Margot, j'affirmais que les féministes avaient touché juste en clamant "notre ventre nous appartient".
Je viens de découvrir, à travers cet amendement imbécile, que j'étais encore en-dessous de la réalité...
Re: Re:
Même si je ne l'avais pas commenté, j'avais lu ton article à propos du livre de Munchembled. Quand on lit le lit et qu'on fait la comparaison avec les grignotages d'aujourd'hui, on a l'impression que la conquête d'une certaine autonomie pour les femmes est une lutte sans fin, un vrai mythe de Sisyphe, et que régulièrement on revient en arrière sous les prétextes les plus divers.
Aujourd'hui on assiste à un retour à l'obscurantisme. C'est un des nombreux prix que la société française va payer pour ne pas avoir été voter au premier tour des dernières élections présidentielles. Les gouvernements de gauches sont, comme tout gouvernement, loin d'être parfaits, mais quand on laisse la droite ou ce qu'on appelle avec euphémisme "les conservateurs" prendre le pouvoir, on est sûrs qu'il y aura une régression au niveau des droits acquis pour tous, car les conservateurs ne "conservent" que leurs propres intérêts et leurs propres droits.
Vent de folie ou de stupidité?
Voici, pour « faire pendant" à l'oeuvre de la chambre des députés française, ce que vient d'approuver le parlement italien:
Toutes les femmes qui désirent avoir recours à la fécondation in vitro devront accepter de façon inconditionnelle l'implant d'un ensemble de 3 embryons "non contrôlés". C'est seulement quand l'implant aura donné une issue positive et qu'une grossesse sera en cours, que les femmes auront le droit de contrôler si le foetus est sain par une amniocentèse. Dans le cas contraire, elles auront le droit d'avoir recours à une IVG!!!
Toutes les femmes députés, de l'extrême droite à l'extrême gauche ont dénoncé une telle "stupidité" demandant que le contrôle soit fait AVANT l'implant. Et bien, elles ont été accueillies par une bonne partie des députés masculins par toutes sortes d'insultes, les plus grossières, que j'aurais honte de reproduire ici.
Est-ce vraiment difficile d'effectuer des tests de contrôle AVANT l'implant, éliminant ainsi les embryons malades? Il y a là-dessous non seulement un refus notoire d'assumer la responsabilité d'une loi soi-disant libérale, laissant la responsabilité de l'élimination aux femmes, mais il s'agit de la énième reprise par une catégorie d'hommes arriérés d'une vieille condamnation biblique : l'enfantement doit se faire dans la douleur.
Chaque fois que les hommes s'en mêlent...
"les vieux démons masculins"