L'histoire qui suit contient tous les ingrédients pour un apologue, car quand la vie veut nous envoyer un message, elle ne lésine pas sur les détails.
Une rue la nuit, des filles sans défense, des truands stupides, des gifles, des appels à l’aide, et pour finir lui, le bon clochard. Etant né un 24 décembre, il s’appelle Noël. Et il a fait ce que tous les justes de toutes les époques ont toujours fait, les bons comme les méchants, les propres comme les sales. Il a fait un geste humain. Comme tous les Schindler ou tous ceux qui, à l’improviste, font un geste altruiste au risque de leur vie. Cela s’est passé dans une grande ville, une parmi tant d’autres.
Donc, l’autre nuit, sur la place…. à …., Noël est intervenu dans une situation injuste de la seule façon dont il pouvait le faire. Il a offert son corps de soixante ans aux barres de fer des sales types, afin qu'un groupe de cinq étudiantes ait le temps de prendre la fuite. Certains diront qu’il n’avait rien à perdre, mais ce n’est pas vrai. Il avait sa vie, et s’il réussit à sortir du coma, il l’aura encore. Une vie qui l’avait écrasé, avec ses métiers trop nombreux, tous sanctionnés par un échec, et ce vide tout autour qui peu à peu avait fini par pénétrer jusqu’au fond de son être. Ceux qui connaissent des clochards comme lui, bien tranquilles, savent qu’ils n’ont plus la moindre envie de se protéger, pas même d’eux-mêmes. Mais même dans le cœur le plus déprimé il existe une valve qui, même quand on s’est abandonné à son propre destin, reste sensible à l’appel du prochain. On l’appelle humanité. Beaucoup l’ont oublié, probablement parce qu’elle n’a pas l’argent nécessaire pour se payer des messages publicitaires. Mais de temps en temps, elle trouve encore quelqu’un qui les lui fait gratis, au prix de sa propre vie.
(Sources : La Stampa)
Commentaires et Mises à jour :
Re:
Songe, merci pour ce commentaire chaleureux. En ce qui concerne Noël, on ne sait pas encore comment se terminera cette histoire, vu qu’il est encore à l’hôpital dans le coma. La municipalité de la grande ville dans laquelle cela s’est passé a décidé de l’adopter et sa famille avec qui il avait décidé de couper les ponts s’est manifestée. Mais son histoire, comme tant d’autres, vaut la peine d’être raconter.
Il y a plusieurs années, après différents gros problèmes d’argent et un dernier licenciement, Noël avait décidé de disparaître, de laisser tout son passé derrière lui. Ce sont ses deux amis, T... et F..., SDF eux aussi, qui le racontent. Ils se rencontraient dans le même Restaurant du cœur près de la gare de... où ils ont passé de nombreuses nuits ensemble. T... est allé le voir à l’hôpital, mais on ne l’a pas laissé entrer parce qu’il n’a aucun lien de parenté avec lui !!!
Et pourtant, la « famille » de Noël, ces dernières années, c’était justement ces deux amis et une dame de la rue aux cheveux rouge feu qui ces derniers temps était devenue sa compagne. Il paraît qu’aucun d’eux n’a été surpris par son geste, ils disent qu’ils en auraient fait autant. Quand on vit dans la rue, on sait très bien que les actes de violences ne sont pas rares vu qu’il arrive bien souvent qu’on s’en prenne aux clochards. Chacun d’eux a vécu au moins un de ces épisodes, mais ils n'ont pas fini sur les journaux. De Noël, ils disent que s’il a fini sous les ponts, c’est « un peu par choix, et un peu par nécessité ». « Il ne demandait jamais la charité », précise T..., « et il ne faut pas parler de lui comme d’un « clochard » , c’est humiliant. Nous, nous sommes propres même si nous n’avons pas de domicile, et nous savons comment gagner notre vie. » Lui, par exemple, il tire les cartes, F..., au contraire, s’arrange comme il peut, en faisant quelques petits boulots au noir. « Avec Noël, quand on dormait dans la gare de ..., on a souvent travaillé ensemble. Comme on ne peut pas dormir huit heures, on se levait à cinq ou six heures du matin et on allait décharger les cagettes de fruits et de légumes dans les marchés généraux. On se faisait plus ou moins 130 francs, juste de quoi manger, pour les cigarettes et une bouteille de vin. On allait attendre les bus qui arrivaient de l’étranger pour aider les gens à décharger leurs bagages, et là aussi on se faisait de trente à cinquante francs. » La dernière fois que T... a vu Noël, c’était le 17 octobre, à la journée des SDF organisée justement dans cette gare. Pour les fêtes, T... a déjà pensé à un cadeau pour son ami : le journal de la rue « Voci e Pensieri », dans lequel certains SDF écrivent (dont T...) et qui dédiera à Noël sa couverture du 24 décembre, le jour où il fêtera ses 58 ans.
(Sources : Il Manifesto)
J'espère comme toi que l'histoire de Noël se terminera bien, mais je ne peux pas m'empêcher de penser à tous les autres SDF. Quelle société que la nôtre!
Re: Re:
Et lorsqu'un jour, elle sera mise sur disque, je vous remercierai, toi ImpasseSud et toi, Songe, pour vos si jolis mots, pour m'avoir fait connaître cette belle et malheureuse histoire.
Re: Re:
Oui j'ai souvent des échardes au coeur à voir ces corps couchés au long des trottoirs quand tombe la nuit et je me fais des promesses coupables pour demain en sachant qu'aujourd'hui ce n'est pas en ouvrant ma porte que je répondrais à un problème de fond ... alors j'essaye d'aménager ma vie, mon coeur, mes pensées, mes moyens pour pouvoir demain prétendre assumer le pas que je souhaiterais éventuellement faire vers ceux que la société a amené sur le banc de touche sans recours possible ...
Je pense me proposer pour les maraudes à Paris qui ramènent les SDF vers les foyers et qui vont à eux pour leur parler, non pas que j'apprécie les foyers qui leur enlèvent une certaine dignité qu'ils s'efforcent de conserver, mais je crois qu'il y a des mots qui réchauffent et qui restent indispensables si on sait les trouver :o)
Espérons pour lui Impassud et pour un monde où il fait bon savoir que parfois ça prend un tournant plus heureux :o) !
Re: Re: Re:
Re: Re: Re:
Songe, j’ai une très bonne connaissance qui, pendant plusieurs mois, s’est occupé des SDF la nuit. Il le faisait d’une manière très convaincue, n’obligeant jamais les gens à aller dans les foyers. Parfois cela se réduisait à un moment de conversation. Personnellement j’étais très fière de lui. Son entourage cependant regardait la chose d’un peu haut, car ce genre de volontariat, malheureusement, ne nourrit pas son homme.
Et c’est bien là le drame et l’ambiguïté des services sociaux. D’un côté on a des fonctionnaires bien souvent blasés et rigides pour qui ce qui importe c’est de garder leur place. Et de l’autre on a des volontaires, qui sont disponibles et agissent avec cœur, mais qui ont bien du mal à concilier ce choix avec une vie de famille et de travail.
Re: Re: Re: Re:
Si seulement chacun tendait la main à ces personnes, au lieu de cela, des maires les chassent des centres villes pour ne pas "indisposer", soit disant, celles et ceux qui peuvent (encore) vivre normalement.
La lecture de ton article me fera avoir un autre regard dorénavant.
Un mot pour Noël, pour souhaiter que le plus doux pour lui lui arrive ...
Que ce soient ses yeux qui se ferment sur un dernier geste de bonté ...
Que ce soient ses yeux qui se rouvrent sur un monde qui, reconnaissant saura lui offrir encore des sourires et des lendemains généreux ...
Merci de cette belle histoire Impassud ... c'est pour cette humanité que mon coeur a des sursauts d'amour en chaque jour et il me plaît de voir qu'elle existe et que d'autres la reconnaissent :o)
Grosses bises
Songe