Saviez-vous que dans le domaine agro-alimentaire d’un hypermarché de 10.000 m2, 146 tonnes (nettes) de produits alimentaires invendus ou en surplus sont destinées à être détruits alors que, concrètement, il sont encore bons, mais qu’on les jette parce que la date d’échéance est proche ou parce que la confection a quelques défauts ? 70% de cette marchandise est destinée à l’homme et 30 % aux animaux. Si on prend en considération un total de 500 hypermarchés, chaque année on pourrait récupérer 50.000 tonnes de nourriture. Et compte tenu que la quantité moyenne de marchandise nécessaire pour confectionner un repas est de 500 gr., avec les invendus des supermarchés on pourrait servir 204.400 repas par an, soit 560 repas par jour.
L’idée est née suite à une recherche lancée en 1998 à la Faculté d’agronomie de l’Université de Bologne (Italie), comme réflexion et approfondissement des cours d’Economie agroalimentaire. En 2001, elle a donné naissance à l’association « Last Minute Market », dont le projet s’adresse d’un côté aux entreprises de la grande distribution qui doivent gérer tous les phénomènes – très souvent indésirables et imprévisibles - des invendus alimentaires (et non alimentaires), et de l’autre, aux administrations et associations charitables. Elle a pour but d’offrir un service capable de valoriser les produits invendus de façon avantageuse du point de vue économique, sociale et environnemental.
Le phénomène de « surplus dans les rayons » est consistant, mais vue la nature périssable des biens, il est nécessaire de trouver une solution à toute une série de problématiques telles que la rapidité de la récupération, la prise en charge de la responsabilité des garanties qualitatives des produits alimentaires, leur effective utilisation bénéfique, la création de rapports entre la non-offre (les entreprises de distribution qui n’offrent pas cette marchandise, mais la détruisent) et la non-demande (population qui, assistée par des associations, pourrait profiter de ces produits, mais qui, n’étant pas au courant de leur existence, n’en fait pas la demande).
Il est donc devenu nécessaire de créer un marché (ou plutôt un non-marché du fait de la nature « non » de l’offre et de la demande) dans lequel la non-offre et la non-demande puissent se rencontrer, obtenant des avantages réciproques dans le respect des normes hygiéniques, sanitaires et fiscales, créant la possibilité pour les réalités « for profit » (non-offre) d’interagir avec les réalités « no profit » (non-demande), et faisant en sorte que les exigences des unes deviennent l’avantage des autres. Pour que ce soit possible, il est indispensable qu’il y ait un intermédiaire capable d’accomplir un rôle fondamental de contact entre les deux interlocuteurs.
L’équipe actuelle de « Last Minute Market » comprend 7 jeunes titulaires d’un diplôme universitaire en Economie agroalimentaire (équivalant DESS et DEA), convaincus que la solidarité peut se faire de façon professionnelle, et elle est soutenue par des enseignants universitaires, des avocats-conseil, des experts en informatique et en comptabilité, un certain nombre d’opérateurs du secteur tertiaire et des étudiants.
Pour l’instant, elle opère dans la région de Bologne. Chaque matin, à 8 heures, un de leur représentant se présente dans un hypermarché pour retirer les « invendus » qui ont déjà été mis de côté pour eux. La marchandise est immédiatement certifiée et livrée aux associations de façon à ce qu’à midi elle puisse déjà être servie à table. Dans cette sorte d’échange physique de biens alimentaires invendus, il est important que les lieux de retrait et de livraison soient très proches l’un de l’autre.
Conjuguant ainsi les exigences du monde no-profit et celles du monde du profit, l’ambition de « Last Minute Market », unique en son genre, est d’être capable de se maintenir économiquement, en créant, si et où cela est possible, des emplois.
Transformer le gaspillage en ressources immédiates ! J’adore les gens qui ont ce genre d’idées positives.
Commentaires et Mises à jour :
Re:
Si tu avais bien lu l'article, tu te serais rendu compte que ce système est différent des banques alimentaires qui, en général, sont approvisionnées par les clients des supermarchés qui paient la marchandise avant de la leur laisser. Ensuite, dans le cas pésent, il n'y aucun stockage, donc pas de banque, vu que la marchandise passe directement de l'hypermarché au destinatire.
Ici, il s'agit d'une récupération intelligente de marchandises qui, autrement, seraient irrémédiablement perdue alors qu'une tranche de la population n'a pas de quoi se nourrir. C'est n'est plus un appel à la charité, mais un service professionnel....
Finalement, une autre façon de voir les choses.
Comme toujours, j'ai apprécié ton article qui m'a beaucoup intéressé.
En effet, je travaille actuellement sur un projet similaire. Il existe à Bruxelles, dans les Marolles, un quartier défavorisé de la "Capitale de l'Europe", une "épicerie solidaire" qui travaille en partenariat avec un représentant de la grande distribution, des maraîchers et des grossistes.
Ils achètent les produits à 10 % de leur prix de vente public et les revendent à 20 %. Cette marge bénéficiaire permet de rétribuer des personnes en insertion socio-professionnelle (en formation chez le distributeur et prioritaires pour tout emploi qui s'y libérerait) et de couvrir les (faibles) coûts de fonctionnement.
Le projet sur lequel je travaille est inspiré de celui-là et réunit autour d'une même table la Ville de Charleroi (dans le cadre de la Politique des grandes Villes), le CPAS (l'équivalent des CCAS français), des opérateurs d'insertion socio-professionnelle, dont Archipel, le centre que je dirige, et des opérateurs privés (chaîne de distribution, association de commerçants, etc.).
Nous comptons ouvrir une telle "épicerie solidaire" dans le courant 2004.
Malheureusement, ce type de dispositif connaît déjà des dérives, puisqu'une boutique sociale locale de ce type accordait aux mandataires politiques de sa commune les mêmes réductions qu'aux bénéficiaires de l'aide sociale (seuls autorisés à utiliser ce système, en principe). Le Ministre régional compétent est d'ailleurs intervenu pour remettre les choses en place...
Mais les (rares) dérives d'un système ne doivent pas nous décourager d'aller dans la bonne voie : que les invendus profitent à des personnes en difficulté plutôt qu'aux gérants d'incinérateurs ou de décharges.
Merci pour la référence à Last Minute Market que je contacte dès aujourd'hui.
Re:
Marco, tu ne peux pas t'imaginer le plaisir que me fait ton commentaire. En postant mon article, je me demandais justement si, par hasard, il allait avoir un impact réel, ne serait-ce qu'auprès d'une seule personne, au-delà de la simple lecture.
Pour ma part, je dois avouer que je ne suis pas aussi engagée que toi. Par contre, je me fais un honneur de diffuser au maximum toutes les initiatives qui peuvent rendre notre monde plus humain, et j'essaie de donner un petit coup de pouce quand c'est à ma portée.
tu ne connais pas le mode de fonctionnement des banques alimentaires!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! les clients c'est marginal, les banques recupèrent les produits non vendables pour les motifs que tu as détaillée dans l'article, stockent et distribuent gratuitement, en France. Bien sur il y a toujours des petits malins qui savent faire de l'argent sur les plus pauvres. Bien
Re:
Re:
Je connais ce pojet car je vais souvent aux Marolles et j'en ai souvent entendu parler. Et franchement, c'est le genre de choses qui me met du beaume au coeur... Bref, continue Marco et bravo ImpasseSud.
Maintenant, il est un problème encore plus profond: l'agriculture (au sens large). Alors que les 2/3 de la planète crèvent de faim, il n'y a jamais eu autant de bouffe sur la Terre... Pourquoi? A cause de la surproduction et des primes qui vont avec. Je m'explique.
Un agriculteur "aisé" va pouvoir bénéficier plus facilement des primes car il a plus de terre et peut donc se permettre de laisser des terres en friches (ce qui donne droit à des primes importantes!) et cultiver à outrance les autres. Lorsqu'il y a surproduction, l'agriculteur sera payé par des fonds européens pour son surplus (assez grassement) et celui-ci partira pour des pays du Tiers-Monde ou...détruit. L'ennui, c'est que le fait que le Tiers-Monde reçoive ces produits à bas prix les empêche de facto de développer sa propre agriculture. Cela leur reviendrait trop cher et surtout, il ne saurait en vivre, qui achèterait les produits puisque le Nord fournit à bas prix? Et c'est là que le bât blesse, c'est un cercle sans fin...
Que faire?
Re: Re:
Weinmann, ton commentaire est plus que pertinent, et il démontre qu'une grande partie de ce qu'invente l'Occident se base souvent, dans un sens, dans l'autre ou en sous-main sur l'exploitation des pays pauvres, comme s’ils n’existaient que pour nous être utiles. Si tu as du temps, ma réponse en la matière se trouve dans deux des commentaires que j'ai postés sur mon article "En Afrique, rien à signaler". L'Afrique réclame à corps et à cris qu'on lui foute la paix avec tous nos surplus. Et, il m'arrive de plus en plus souvent de lire des articles qui démontrent que dans certains pays de ce continent, les gens commencent à se prendre en charge et à s'organiser, et que certains ont même réussi à instaurer des systèmes retables et bénéfiques qui ne demandent qu'à etre imité. On ne peut que souhaiter que la chose prenne de l'ampleur.
Et s'il est vrai qu'au niveau de l'UE les aides à l'agriculture ont permis à bon nombre de paysans de sortir de la misère, il est vrai aussi, désormais, non seulement que le bât blesse, comme tu le dis, mais qu'on est en pleine paranoïa et à bout de souffle. En tout cas, il est honteux de continuer, d’un côté, à augmenter les prix au détail des produits frais, et de l’autre, de les détruire ou de laisser des terrains en friche, alors que de plus en plus de gens, en Europe, ont du mal à nouer les deux bouts.
Re: Re: Re:
Je rejoins Weinmann dans son commentaire. Inutile pour moi de paraphraser. Bomme initaitive que tu as eu là Impasse Sud.
Je reviendrai plus souvent sur ton joueb ! :)