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« Le sourire de ma mère », Marco Bellocchio (2002)
--> Titre original "L'ora di religione"

Dans le jardin d’un appartement, un enfant gesticule et parle de façon étrange. Sa mère l’observe pendant quelques instants, puis elle finit par lui demander à qui il s'adresse : « A l’école, » répond l’enfant, « la maîtresse de religion nous a dit que Dieu est avec nous toute la journée, qu’il ne nous laisse jamais seul. Moi, je lui dis de s’en aller ». Il s’agit de Leonardo et de sa mère, Irene. Au même moment, son père, Ernesto (un très bon Sergio Castellitto), peintre affirmé et illustrateur de livres pour enfants, reçoit dans son studio la visite inattendue du secrétaire du Cardinal Piomini qui l’informe du procès de béatification de sa mère, en cours depuis trois au Vatican sur requête de toute sa famille et à son insu, et qu’on a besoin de son témoignage, parce qu’Ettore, celui de ses frères qui l'a assassinée et à qui leur mère a pardonné son geste avant de mourir s’est renfermé dans un profond mutisme dont il refuse de sortir.
De retour à la maison, sa femme, dont il est en train de se séparer, lui parle de Leonardo. Il regrette tout à coup de l'avoir inscrit à l'heure de religion (1). Très attaché à l'enfant qui lui demande si le paradis existe, il lui déclare que lui, il ne croit pas en Dieu.

Pour l’artiste libre, athée et cohérent qu’il est, cette journée vient d'être le théâtre d'un double choc, d’autant plus que de cette mère dont il a hérité le sourire, sourire qui se présente toujours de façon inopportune et lui cause souvent des ennuis, il n’avait pas une grande opinion.
A partir de ce moment-là, son entourage tout entier va faire pression sur lui, parce qu’un saint dans la famille leur permettrait, dans ce monde catholique qu’est l’Italie, de retrouver la position de privilèges qui était la leur, même si, pour ce faire, il faut « inventer la vie d’une sainte qui n'en était pas une ». C’est alors que tous les coups fourrés deviennent bons....

 


Aucune des synopsies trouvées ici et là sur cet excellent film ne reflète l’état d’esprit dans lequel on est plongé. Ici, tous les détails comptent, les moindres gestes, les moindres phrases sont importantes. Il n’y a pas le moindre remplissage. Il s’agit d’un film fort, où
Marco Bellocchio déccouvre avec maestria un des aspects de l’Italie d’aujourd’hui, avec le pouvoir omniprésent qu'y exerce le Vatican, où le déclin lent mais irrémédiable du parti communiste (si fort il y a trente ans) a permis à l’Eglise catholique de reprendre en sous-main et presque au grand jour toute la place temporelle qu’elle occupait avant, avec toute l’ubiquité qui est la sienne, méfiante et lente dès qu’on cherche à défendre les droits de l’homme, mais que ne choquent ni l’injustice de la distribution des richesses ni celle de la liberté de mœurs ou de la corruption des esprits tant qu’on lui laisse les mains libres et les moyens de remplir ses caisses.  

 

Ce monde est-il perceptible à tous ceux qui ne vivent pas ou n’ont jamais vécu en Italie ? Est-ce que les versions en langue étrangère de ce film réussissent à rendre toute l'oppression de cette atmosphère ? Profondément dérangée moi-même, c’est ce que je me suis demandé tout au long du film. Quelqu’un me répondra-t-il ?
En ces temps de regain des fanatismes, à voir absolument !

 

(1) L’Italie est une république constitutionnellement laïque. Mais par l’intermédiaire des accords de Latran (1929), l’Eglise catholique a réussi a imposé à l’école publique une heure hebdomadaire de cours de « religion catholique », qui, suite aux modifications de ces accords en 1984 est devenue facultative, offrant aux parents d’élèves ou aux élèves dès qu’ils sont majeurs, le choix d’un cours alternatif. Cependant, dans les faits ce cours alternatif est pratiquement inexistant car la plupart des enseignants suit le sens du courant. Si bien que la plupart des parents, même s’ils sont non-croyants, finissent par opter pour l’heure de religion, surtout à l'école primaire et au collège, afin de ne pas mettre leurs enfants dans une situation sujette à discrimination. Dans ce film, c’est le cas du petit Leonardo qui a insisté pour faire comme ses copains.

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Ecrit par ImpasseSud, le Samedi 15 Août 2009, 13:59 dans la rubrique "J'ai vu".