C’est le cas de celui qui s’élèvera bientôt aux portes de Mexico. Tous les murs ne sont pas forcément synonymes d’arbitraire et de honte, comme le mur de Berlin ou celui qui emprisonne la Cisjordanie, de barrière défensive contre les envahisseurs comme la Grande muraille en Chine, ou d’obstacles en défense des privilèges. Certains servent au contraire à récupérer des espaces verts.
A la périphérie de cette mégalopolis de 18 millions d’habitants, 500 hectares du peu des terrains non construits et incultes disparaissent chaque année. Entre ravins, bordures étroites et pentes inutilisables ayant échappé aux incendies, aux décharges illégales ou à l’apparition de bidonvilles abusifs en carton, bois ou briques, il subsiste encore des espaces avec de la végétation, si rares mais néanmoins indispensables dans la ville la plus peuplée (et la plus polluée) d’Amérique. Le ministre de l’environnement du gouvernement du Distritto Federale, Claudia Schienbaum, qui depuis longtemps a déclaré la guerre aux abus en récupérant les quelques espaces verts transformés en lottissements et privatisés pour les chanceux des beaux quartiers de la capitale (loma di Chapultepec), a annoncé la construction d’un mur visant à protéger et conserver ce qu’il reste de vert. Ce projet prend la suite d’une première expérience tentée l’année dernière avec la participation encourageante des communes et des comités de quartiers des délégations Tlalpan, Xochimilco et Tlahuac, à travers l’installation de grillages métalliques afin se s'opposer aux abus et à la voracité des lottisseurs. Désormais il s’agira d’élever un mur en brique d’environ 100 kilomètres de long, pour une coût de 50.000 dollars le kilomètre.
Une expérience similaire a déjà été réalisée il y a quelques temps dans la Sierra di Guadalupe, une zone verte de 5000 hectares aux approches de la ville, parc national sur la carte depuis 1976. Sur la frontière de 80 kilomètres qui divise la zone urbaine de la réserve écologique, on a élevé, avec l’aide du gouvernement et de la Bid, 9 kilomètres de mur et 20 kilomètres de grillage métallique pour protéger l’espace de la pression exercée par les quelques 3 millions de personnes qui vivent à Ecatepc, Coacalco, Tultitlan et Tlalneantla. On y a mis 6 portes d’entrée pour les contrôles, on a créé des projets écotouristiques, des pistes cyclables, des promenades et des zones de culture biologique avec des légumes, des cactus et d'autres variétés horticoles. On a replanté de la forêt sur des centaines d’hectares et la faune sylvestre (tatous, oiseaux, opossums, coyotes, lièvres, etc…) a commencé à repeupler l’espace protégé. La construction de barrières et de contrôles est en train de donner des résultats là où les différentes municipalités avaient failli, quelle que soit leur couleur politique. En peu de temps, les occupations illicites, dues en partie à la pression exercée par les milliers de personnes sans emplois et sans logements provenant des zones limitrophes de la capitale, mais aussi à des groupes de familles pauvres manipulées par des organisations clientélistes qui ensuite vendent les terrains occupés à des entreprises de construction, se sont réduites à 250 constructions abusives dans l'ensemble de la réserve. Le secret de la réussite du projet a été et reste le consensus et la participation citadine, à travers un long travail d’information et de sensibilisation dans les comités de quartiers et les écoles. Dans un pays où la culture écologique est presque inexistante, où 70 % de la population est pauvre et doit, chaque jour, s’inventer un moyen de subsistance, des initiatives de ce genre sont la clef pour la sauvegarde environnementale et la qualité de la vie des habitants. (Sources : Il Manifesto)
Belle initiative, cela va sans dire, que beaucoup de grandes villes devraient imiter. Mais elle ne résout en aucun cas la situation des chômeurs et des SDF qui n’envahiraient peut-être pas les zones en friches s’ils disposaient d’un emploi et d’un endroit décent pour vivre en rapport avec leurs moyens économiques. En fait, on a un peu l’impression qu’on a trouvé une belle solution (de riches) à un problème (les pauvres) qu’on veut éviter d'aborder.
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