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Pluie
--> Finalement, elle est arrivée, méditerranéenne, violente.

Le ciel roulait des nuages bas et sombres, il faisait presque nuit, la mer s’était couverte de stries grises, brunes, incertaines. Des murs de pluie s’étaient dressés en quelques secondes, répandus comme le trop plein d’une fontaine ; les rues s’étaient transformées en torrents boueux, balayant tout sur leur passage ; les bouches d’égouts s’étaient comblés aussitôt, les pierres des chemins de terre s’étaient mises en mouvement. Les cours d’eau à sec s’étaient gorgés le temps d’un soupir, et ils avaient déversé cette crue subite dans la mer, repoussant brutalement loin des côtes l’onde limpide recouverte d’une infinité de petits cercles, insinuant à sa place un panache limoneux ocre, ourlé d’émeraude. Sur la plage, le sable épais était resté indifférent, il avait foncé, tout simplement, et le flux transpercé par la violence des gouttes, s’était fait timide, réservé, presque silencieux : submergé d’eau douce, écrasé, il faisait le dos rond, en attendant.

En un instant, la ville avait sombré dans le chaos. Les voitures hésitaient, leurs phares s’allumaient, leurs essuie-glaces s’affolaient, vainement : elles tâtonnaient, devenaient aveugles, prisonnières des parois liquides.

Les gens s’étaient réfugié ici et là, où ils pouvaient, et leurs pensées s’étaient tournées vers les dommages incertains, les persiennes laissées entr’ouvertes, les voitures que le courant emporte.  Spectateurs de ce déluge, ils retenaient leur souffle, occupés aussi à saisir le moindre fil d’air frais qui aurait pu calmer leur angoisse, déchirer la moiteur. L’eau arrivait aux chevilles ou aux mollets des imprudents qui se risquaient à quitter les abris. Les femmes serraient leurs enfants contre elles, les hommes les prenaient dans leur bras. Tout le monde regardait, muet, l’oeil fixe. Dans l’ampleur du fracas un rire d’enfant fusait, ou un pleur.

 

Puis, aussi soudainement qu’il était apparu, le mur de pluie s’était évanoui, les nuages s’étaient déchirés sous l’insistance du soleil, un coin de ciel était apparu, bleu clair, lavé de frais. En quelques minutes l’été était revenu, toujours aussi chaud. Et le sol mouillé exhalait sa chaleur, sa vapeur, son atmosphère de bain turque, si lourde qu’on suppliait le retour de la pluie.

Et pourtant, l’air était gai, rieur, nettoyé, lumineux, vierge. Les arbres avaient abandonné leur patine poussiéreuse grisée et les gouaches de verts avaient retrouvé leur éclat. La ville était propre, et la colline brûlée par le soleil et par le feu avait étanché sa soif. Même les parfums avaient changé : non plus cette rondeur chaude qui vous enveloppait, mais une âpreté marine, presque oubliée.

 

En deux jours, le paysage a changé, de nouvelles pousses vertes ont pointé. La mer a viré d’un seul coup à l’outremer profond,… à celui de l’hiver. Il fera chaud encore pendant plusieurs semaines, la mer lèchera encore les côtes de ses vagues tièdes, l’onde offrira encore sa volupté, mais l’été a amorcé son déclin et il perd des points, une pluie après l’autre, un orage après l’autre. Une ébauche d’apaisement. Cette année encore, l’automne sera au rendez-vous.

 

Il y a des jours où j’éprouve une confiance infinie en cette terre.
(photo)

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Vendredi 29 Août 2003, 17:22 dans la rubrique "Méditerranée".

Commentaires et Mises à jour :

PierreDesiles
30-08-03 à 16:46

C'est fou ce qu'une ondée passagère peut suciter l'enthousiasme ! Rien à ajouter, c'est très beau!

Le site d'images est un peu long à charger, mais ça vaut de détour.


 
ImpasseSud
31-08-03 à 09:23

Re:

Merci Pierre.
En ce qui concerne la photo, à vrai dire, j'indiquais seulement ma source. Mais il est vrai que le blog en question est beau et très intéressant... quand on comprend l'italien. J'étais meme en train de me demander si je n'allais pas l'ajouter à mes liens

 
PierreDesiles
31-08-03 à 12:48

Re: Re:

Je ne comprends pas l'italien, mais quand on voit la beauté du site, on ne peut que partager cette sensibilité qui caractèrise ce peuple chargé de merveilleuses histoires dans tout ce qui touche à l'art en général.

C'est un pays qui m'attire dans ce domaine, car tous les reportages faits sur cette préservation culturelle, que possède l'Italie, m'ont enchanté. Il fait partie de ces pays, où le monde ne serait pas ce qu'il est, s'il n'avait pas existé. Fait nous encore rêver, ImpasseSud, car je pense ne pas être le seul voyageur de tes écrits.