Il pleut, il pleut, il pleut, il pleut…. Voilà plus de deux mois qu’il pleut pratiquement sans que les interruptions dépassent quelques heures, une demi-journée, très rarement une journée. Ce qui est tout à fait anormal à cette latitude et sur les bords de la Méditerranée, où, en hiver, la règle veut que de très belles journées, limpides, ensoleillées et douces, avec les amandiers et les mimosas en fleurs, alternent avec des périodes brèves de violentes tempêtes et de vents déchaînés.
A vrai dire, tout a commencé à mi-septembre, après cinq mois de sécheresse absolue, gâchant ainsi la fin de l’été. Le spectacle est sinistre. Ici, là, un peu partout, la terre trop longtemps maltraîtée par les déboisements, les incendies, l'incurrence, s’écroule, s’éboule, coule partout, étalant de longues et larges déchirures d’un brun huilé au milieu des bois et des champs qui n’ont jamais été aussi verts. Aux embouchures des torrents, la mer est carrément jaune. Les terrains, les murs, les maisons se lézardent, des collines tout entières glissent brusquement : déjà quatre morts et on ne compte plus les évacuations forcées. Les rues des villes se transforment en emmenthal, des routes de campagne et de montagne disparaissent dans les ravins, et même les grandes artères comme les routes nationales, la voix ferrée et l’autoroute sont coupées. Hier, la région était quasiment isolée. De la boue, de la boue, de la boue partout…. Même les cimetières se révoltent : celui-ci, qu’on a installé au sommet de cette hauteur menace de s’effondrer sur son village. Là, le grand mur de soutien des niches mortuaires s’est carrément désagrégé, mettant à nu tous les vieux cercueils. On s’attend presque à ce qu’ils s’ouvrent, et sous ce ciel noir qui ne cède pas un pouce à la moindre lueur céleste, dans ce paysage ébété qu’aucun vent ne vient secouer, j’en ai froid dans le dos. Et il continue à pleuvoir : sur la mer, sur le Détroit, un rideau que rien n’écarte, fait de bruine, de cordes et parfois de grêlons.
On dirait presque que la nature a une fois de plus décidé de nous rappeler à l’ordre, contre l’habitude des abus, avec les déviations et les réductions des torrents dans lesquels on a construit, mais aussi contre tous les mauvais conseilleurs et les diseurs de bonne aventure qui assoient leur popularité sur le jeu du miracle. Depuis quelques jours, je n’arrive pas à m’ôter de la tête la scène de Out of Africa, où un Kikouyou s’oppose à la construction ou au renforcement (il faudrait que j'aille vérifier) d’une digue qui permettrait l’irrigation des plantations de café, en disant plus ou moins que « cette eau doit rentrer chez elle, qu’elle appartient à Mombasa ». C’est tout à fait cela, toute l’eau qui tombe du ciel doit pouvoir suivre sa pente naturelle et trouver un lit à la taille de ses excès. Et pendant que les cordes continuent à tomber, je tremble pour tous ceux qui sont à risques, et qui, ce soir ou demain, auront peut-être tout perdu ; et ici dans mon appartement plutôt mal chauffé (mais ici au sud, c'est presque normal), j'ai honte des privilèges qui sont les miens parce qu'à
Mots-clefs : Méditerranée, Planète Terre, Eau, Sujets brûlants, Société, Italie, Immigration
Commentaires et Mises à jour :
Vu que l'Italie ferme résolument les yeux sur ses esclavagistes.....
A part ça et heureusement pour eux, depuis cinq jours et sauf une petite averse ce matin, le temps s'est remis au beau.