Les habitués, ceux qui venaient souvent me donner leur avis, se demandent peut-être pourquoi, de plus en plus souvent, je n’autorise plus les commentaires. La réponse est simple, pour l’instant je ne me sens pas la force de discuter. J’ai assisté et même participé au déchaînement de la campagne électorale relative au TCE, j’ai exprimé ma honte face aux extériorisations grossières qui ont suivi la révolte des banlieues, j’ai fait part de ma lassitude face à la bêtise et à l’opportunisme de la bourrasque des vignettes, j’ai préféré ne pas m’engager dans une discussion stérile contre le CPE parce que je pense que c’est la définition du rôle de l’homme par rapport au travail qu’il faudrait commencer par dépoussiérer, et, cerise sur le gâteau, je viens de subir, horrifiée et incrédule, l’épouvantable climat de délire de la campagne électorale italienne. Et, comme si cela ne suffisait pas, nous voilà avec les scandales Clearstream (en France) et GEA (en Italie), etc. Ce déluge sans fin ne m’amène qu’à une seule et unique conclusion : aujourd’hui, on parle beaucoup trop, on débat beaucoup trop, et, la plupart du temps, sans être parfaitement informés ou avoir eu le temps de réfléchir, glissant rapidement vers l’énervement ou même la mauvaise foi la plus écœurante et la plus partisane.

Cette débauche de mots et de phrases, ce droit d'expression mal compris, cette reprise aveugle des slogans et des quolibets, ce verbiage assourdissant finissent par avoir deux conséquences :

1) Comme personne n’écoute plus personne d’autre que soi-même, la communication n’est plus qu’apparente. Encore pire, on crée une telle confusion dans la tête des gens, on y ajoute une telle désinformation que tout le monde, sans plus chercher à savoir ou à comprendre, finit par rester sur ses positions. Peu importe qu’elles soient justes ou fausses, à leur avantage ou leur fassent du tort, à propos ou hors de propos, peu importe qu’on sache ou qu'on ne sache pas de quoi on parle, la seule chose qui compte c’est de faire taire ou de crucifier ceux qui disent quelque chose d'autre, ceux qu’on ne voit plus que comme des « adversaires », perdant complètement de vue le but primeur de la dénonciation, c'est-à-dire de déclancher une amélioration.

2) On aboutit à une stagnation de la société, voire même à une régression, où à force de focaliser sur des cas particuliers on masque ce qui est important, essentiel, fondamental pour la population. Personne ne peut plus prendre la moindre décision réfléchie. En même temps, on encourage la montée à vide de l’exaspération des citoyens qui, au lieu de reprendre possession de leurs pensées et leur rôle sérieusement en main, vont s’accrocher aux basques du premier venu qui leur jette de la poudre aux yeux, comme s’il s’agissait d’un sauveur, oubliant toutefois que ce comportement démagogique les transforme en proies faciles du populisme.

Ce qui fait que, tout à coup, j’ai éprouvé un impérieux besoin de me taire, et c’est ce que je viens de faire pendant deux mois. J’en suis heureuse car cela m’a permis de prendre du recul, de redéfinir l’orientation de mon joueb/blog dont je n’étais plus satisfaite. Toutefois, étant donné que je suis incapable de rester indifférente à ce qui se passe dans le monde, que chaque évènement continue à susciter en moi une foule de questions et de commentaires, je reprends, à petits pas, en sourdine, comme dans une réflexion à haute voix, mais noir sur blanc pour la rigueur. Et, cette fois-ci …. sans perdre de vue que sur la Terre il y a aussi la beauté, la délicatesse, la pureté de la fleur du câprier, de millions de fleurs de câprier, et qu'aucun scandale ne peut faner cette beauté-là. 

Mots-clefs : Société, France, Italie, Union Européenne