Pour faire suite à mon billet de dimanche et alors que le projet de décret d'urgence de quelques lignes (1) était en discussion au Sénat en prévision du vote imminant, Eluana Englaro est morte lundi soir vers
On pouvait donc croire que le projet de ce décret d'urgence auquel on avait déjà proposé près d'un millier d'amendements allait être abandonner. Et bien non, il reste à l'ordre du jour. Car, pour la majorité de Berlusconi au coude à coude avec le Vatican qu'il sert et dont il se sert, il faut absolument faire en sorte qu’un tel fait ne puisse plus jamais se représenter, non seulement du côté du choix au refus d’un traitement car « la vie est un don dont seul Dieu peut disposer », mais aussi du côté du droit au véto de la Présidence de la République, qui soi disant empêche de gouverner. Quant on sait que depuis avril 2008, le gouvernement en place en a déjà émis quelque soixante-dix sans que Giorgio Napolitano n’intervienne, et que ce droit de véto n'a été utilisé que cinq fois en soixante ans de République, y a-t-il encore des doutes sur le but que poursuit Berlusconi ?
L'opposition a cependant réussi à faire reporter le vote d'une semaine afin de donner aux esprits le temps de la réflexion. A mon avis, ce délai est bien trop court pour que les esprits, qu’on va continuer à chauffer à blanc, se calment. En attendant les résultats sont donc les suivants :
- Personnellement je suis soulagée par le fait qu'Eluana Englaro soit décédée. Non seulement pour elle et pour sa famille qui a vécu un calvaire de 17 ans, mais parce que si le décret de loi avait été approuvé aujourd'hui, ce mercredi, donc dès demain, les Carabiniers pouvaient faire irruption dans la clinique pour imposer la reprise de la nutrition. En plus, cela annule un procès en cours contre son père à qui on voulait ôter la tutelle.
- Si le décret est approuvé et devient loi :
1) il annulera de fait l’article 32 de la Constitution qui dans le chapitre relatif aux rapports éthico-sociaux récite que « personne ne peut être obligé à subir un traitement médical si ce n’est par une disposition de loi. La loi ne peut en aucun cas violer les limites imposées par le respect de la personne humaine. », et le remplacera par le droit à l’application systématique et légale de l’acharnement thérapeutique. Vu les progrès de la science, ça promet.
2) il rend vain tous les travaux en commissions parlementaires effectués depuis des années en vu de créer le droit au « testament biologique ». Un terrible pas en arrière.
Bref, après toutes les lois infâmes votées il y a moins d'une semaine contre les plus démunis, voilà un nouveau tour de vis pour l'Italie et pas des moindres. Un beau palmarès pour un parti majoritaire qui se réclame de "la liberté" ! Il ne s'agit sans doute plus que de la liberté de bêler ou de celle de tourner la tête ailleurs, car hier soir, tandis que le pays est sur le fil du rasoir, l'audimat, entre l'immoralité de Grande Fratello (= Big Brother) et la légèreté de X Factor, dépassait les 50 %. Heureusement, la pétition "Rompiamo il silenzio" (et là) dont le but est de réveiller les consciences face à ce qu'on appelle déjà un état de post-démocratie a déjà recueilli plus de 160.000 signatures en trois jours. En tout cas, moi j'éprouve une grande admiration pour Beppino Englaro, le père d’Eluana, qui pendant 17 ans a eu le courage, la force et l’immense amour nécessaires pour lutter afin de faire respecter la volonté de sa fille.
1. Traduction de l'italien : "En attendant l’approbation d’une discipline législative complète et organique en matière de fin de vie, l’alimentation et l’hydratation, en tant que formes de soutien vital et physiologiquement finalisées à soulager les souffrances, ne peuvent en aucun cas être suspendue par ceux qui prêtent assistance à des sujets qui ne sont pas en mesure d’y pourvoir par eux-mêmes."
2. Suivi sur la presse internationale.
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Commentaires et Mises à jour :
Re:
Alors que faut-il faire vu qu'il n'y a aucun véritable leader en vue depuis que la gauche a profondément déçu ? Peut-être Antonio di Pietro. Sa cote est en forte hausse, mais elle ne dépasse pas encore 10 %. Et au sein du gouvernement et même de la gauche il a beaucoup d'ennemis car il est trop intègre, trop incommode, il jette trop de pavés dans la mare.
Pour en revenir à la pétition, je ne sais pas si tu as eu le temps de lire le texte qui est assez long : chaque paragraphe se réfère, sans les citer explicitement, à différents évènements et faits bien précis, depuis 2002 date à laquelle le mouvement Libertà e Giustizia est né, déjà pour contrer le populisme de Berlusconi. Elle a donc pour but, au-delà des signatures, d'inciter tous les Italiens de bonne volonté (et il y en a bien plus qu'on ne croit) à se réveiller et à rompre le silence consentant qui est apparemment le leur, par paresse ou par lassitude. C'est tout du moins comme cela que je l'ai perçue ... et signée.
Comme d'habitude...
Pour ceux qui veulent en savoir plus voir la réponse en défense de la Constitution de l'ex-Président de la République Oscar Luigi Scalfaro à Berlusconi, et l'émission AnnoZero "Eluana e Bonaparte" (en it.)