Le 5 juin dernier, les délégués de 183 pays réunis depuis le mardi 3 au siège de
Ce ne sont certainement pas tous ceux qui vivent à ses crochets ou les pays qui s’en servent pour se donner bonne conscience et faire la loi en même temps qui vont contester son existence. Au contraire, on se gargarise, tandis que les gouvernements d’une partie des pays qui devraient en bénéficier (comme le Brésil et l'Argentine) virent au libéralisme immédiat sans plus aucun projet à long terme pour éradiquer la dénutrition due à la pauvreté.
Aujourd’hui, aux problèmes de fond qui ont toujours causé la faim, il faut ajouter les déséquilibres qu’ont créés les « bons conseils » de monoculture extensive (soit disant plus rentable) de
Pour s’en convaincre il suffit de lire (ou simplement feuilleter) le Rapport de l’Évaluation externe indépendante de l'Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) commissionnée par l’ONU à un groupe d’économistes sous la direction de Leif Christoffersen, publié en septembre 2007 (472 pages). Ou encore son budget
Malgré un bel emballage rédactionnel, chaque page ou presque met en évidence son immobilisme (Jacques Diouf est à sa tête depuis 14 ans !!), sa lourde bureaucratie, omniprésente, rigide et très coûteuse (qui engloutit une grosse partie des budgets), ses lenteurs, ses gâchis (200 millions d’euros partent en réunions !), son manque de communication transversale et à tous les échelons, les démotivations d’un personnel souvent non qualifié mais engagé sous pressions politiques ; l’incohérence des priorités, choix, revirements et répartitions au niveau de ses projets et leurs taux d'efficacité extrêmement bas sur le terrain compte tenu du peu de temps effectif réservé à leur réalisation (30% contre 70 % à la partie normative !) ; ses dépenses régulièrement extrabudgétaires avec l’augmentation de ses endettements et la baisse régulière des financements des pays-membres les plus riches ; et, pour finir, la perte de vue de son objectif primordial qui est de fournir, diffuser du savoir.
(1) Lire à ce sujet l'excellente interview à Jean Ziegler publiée dans Le Monde : Crise alimentaire : le sommet de la FAO à Rome est "un échec total"
Mots-clefs : Sujets brûlants, Planète Terre, Afrique, Asie, Italie, Occident
Commentaires et Mises à jour :
Crise alimentaire : le sommet de
Propos recueillis par Laura Marzouk pour Le Monde |
Jean Ziegler est l’ancien rapporteur de l’ONU sur le droit à l’alimentation. Il est aujourd’hui membre du comité consultatif du conseil des droits de l’homme des Nations unies et auteur du livre L’Empire de la honte (édition Le Livre de poche).
Le sommet de
Jean Ziegler : C’est un échec total, c’est extraordinairement décevant, et très inquiétant pour l’avenir des Nations unies. Le sommet est assez unique dans l’histoire de cette organisation : plus de 50 chefs d’Etat et de gouvernement se sont réunis pour discuter de solutions concrètes à apporter à l’effroyable massacre quotidien de la faim, qui s’aggrave encore avec l’explosion des prix mondiaux des matières premières agricoles depuis cinq ou six mois. Mais le résultat de cette conférence est totalement scandaleux : l’intérêt privé s’est imposé, au lieu de l’intérêt collectif. Les décisions prises à Rome risquent d’aggraver la faim dans le monde, au lieu de la combattre.
Quels engagements des membres de
Je souhaitais trois décisions. Tout d’abord, l’interdiction totale de brûler de la nourriture pour en faire des biocarburants. Ensuite, retirer de
La déclaration finale du sommet, difficilement adoptée jeudi soir, engage les pays membres de
Non, c’est de l’hypocrisie la plus totale. D’ailleurs, ce but est celui du millénaire. C’est en septembre 2000, au seuil du nouveau millénaire, que Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies à l’époque, avait réuni les pays membres des Nations unies à New York et avait fixé neufs buts du millénaire pour éradiquer la misère, la faim, etc. Le premier, qui a été adopté, était déjà de réduire de moitié les affamés d’ici à 2015. Mais entre 2000 et 2008, la faim n’a pas reculé, elle a massivement augmenté. Selon
Qui sont, selon vous, les responsables de cet "échec" du sommet de Rome ?
Il y en a trois principaux. D’une part, les Etats-Unis et leurs alliés canadiens et australiens qui ont saboté le sommet en faisant pratiquement la politique de la chaise vide. D’autre part, les grandes sociétés multinationales. Dix sociétes multinationales contrôlent actuellement 80 % du commerce mondial des aliments de base mais elles ne sont pas
Sommet de la FAO
- A Rome, on parle d'alimentation.
- M'en parle pas ! Ça me fait venir l'eau à la bouche !
(Vignette de Vauro parue sur Il Manifesto du 04.06.2008)