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Après les psy, les coaches

 Bien que le terme de "coach" m'indispose (le français coule de plus en plus!), j'ai lu avec grand intérêt un article publié dans Le Point, qui s'y réfère. Il est de plus en plus évident qu'une bonne partie des hommes d'aujourd'hui, parmi les plus chanceux, n'arrivent plus à mener leur barque tout seul. Ils sont submergés par des vagues qui les assaillent de toutes parts. Et pour se situer, reprendre pied et s'accrocher, plus aucun interdits qui leur donneraient des points de repère, comme le signale le sociologue Alain Ehrenberg. Concilier famille et travail est devenu extrêmenent ardu, et ils n'y arrivent plus. Alors, après avoir cru aux psy qui bien souvent n'ont pas de réponses, ils sont en train de se jeter dans les bras des coaches qui, eux, en ont. De 100 à 600 Euros la séance (non remboursable par la SS), c'est le moins qu'on puisse leur demander. Mais il s'agit de solutions à cours termes, bien souvent très simples, qu'aurait pu leur suggérer quelqu'un de sensé, lors d'une conversation amicale, ou que la plupart des gens sont capables de trouver seuls,.... à condition de prendre le temps de les chercher et de garder de véritables relations humaines. Apprendre à faire un planning, apprendre à dire bonjour, apprendre à faire une requête de manière positive.... Et ici on parle de cadres supérieurs! Si le problème n'avait pas pris autant d'ampleur, il y aurait presque de quoi rire.

 

Mais en fait la question est bien autre. Ces gens-là sont de plus en plus mal dans leur peau et se comportent comme s'ils étaient en train de se noyer. Ils ont sans arrêt besoin d'assistance (quelle que soit sa forme), car très rares sont ceux qui réalisent que ce ne sont pas eux qui sont des incapables, mais bien la vie qu'on leur impose qui est malsaine, qui les pousse à l'hystérie d'abord, à l'essouflement ensuite, et pour finir à des décisions stupides parce que trop hâtives, peu réfléchies. Mais peut-on nager avec mille boulets aux pieds, et sans savoir où se trouve la rive? Si on vous pousse au milieu d'un océan d'insécurité, où tout est instable (emploi et famille) et qu'à tout moment on prétend de vous des pointes de vitesse dans tous les styles de nages, qu'on vous arrache à la moindre pause grâce (?) à votre portable, que même ces fameuses pauses sont superprogrammées, à quoi servent les beaux discours, les stimulations? L'arrogance (car le trop est toujours arrogant) n'est pas une preuve de génie ou d'efficience, ce n'est rien d'autre que de l'arrogance, vide et négative. Le coach, c'est le dernier placebo en vogue, sous un déguisement de bouée de sauvetage. Ses conseils peuvent effectivement vous maintenir la tête hors de l'eau pendant quelques temps, mais ils n'ont aucun impact sur l'océan de difficultés qui vous entoure. C'est ce fameux océan qu'il faudrait redimensionner... et non pas le nageur.

 

Durant les deux derniers siècles, l'homme a cherché à améliorer sa situation sociale. Pour cela, il n'allait pas voir un psy ou un coach pour que celui-ci l'aide à supporter l'injustice sociale, il a lutté pour la réduire. Personne d'entre nous ne supporte longtemps d'avoir une épine dans le pied. Un cerveau serait-il moins important qu'un pied? Alors pourquoi supporter un système de vie qui broie les rythmes, nuit à la santé et dispense de la douleur? La vie n'est jamais parfaite, mais pourquoi a-t-on oublié les limites de l'acceptable? Si certains systèmes de vie actuels sont insupportables, il faut en changer, c'est tout. Et il me semble que ce genre de raisonnement (inapplicable pour les plus démunis qui n'ont même pas ce choix) est à la portée d'un cadre, ou non?

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Mardi 1 Juin 2004, 14:37 dans la rubrique "Actualité".

Commentaires et Mises à jour :

Vinzzz
01-06-04 à 15:14

Bonjour

J'ai rencontré récemment un futur coach. En fait, il s'agissait d'un homme de 40 ans environ qui s'appretait à commencer une formation pour devenir coach précisément. Il parlait avec emphase de sa future profession et était convaincu d'avoir choisi la bonne voie. Sans vouloir lui faire de faux procès, je lui exposai mes réserves sur ce type de pratiques non encadrées et susceptibles d'influencer éventuellement négativement les sujets. Sans le moindre argument convaincant, il s'évertuait à tenter de me prouver que sa discipline n'avait rien de comparable avec les dérives d'un certain nombre de psychotérapeutes farfelus ou de développeurs-personnels-sectarisants. Seul appui de sa démonstration : sa propre bonne foi et son expérience avec celui qui avait été son coach perso. En fait, c'était le fameux coach en question qui lui avait conseillé, après avoir pris conscience de sa capacité d'écoute, de se lancer à sa suite dans la profession. Pour faire simple, la solution que lui avait proposé son coach pour regler ses problèmes était de devenir coach lui même. Et là, la vérité lui était apparu : le conseil du coach lui ouvrait en effet un horizon radieux ; il avait enfin une piste de travail et se sentir déjà renaître socialement dans sa nouvelle fonction de gourou. Le coach l'avait révélé à lui même ; il s'était trouvé et, fort de cette révélation, il se sentait pret à apporter ses lumières à l'humanité. Curieux comme cette histoire me fait penser à ces adeptes de sectes qui "se mettent à leur compte" ou comme les gogos des ventes pyramidales qui deviennent eux-mêmes têtes de réseaux pour de nouveaux gogos. L'amendement Accoyer qui voulait réglementer les psychothérapies a été décrié par la majorité des professionnels de la profession ; le député à l'origine du texte pourrait peut-être se pencher sur le coaching. Ca ne pourra pas faire de mal d'y voir un peu plus clair.

 
tgtg
01-06-04 à 15:27

Re: Bonjour

"....la vie qu'on leur impose qui est malsaine, qui les pousse à l'hystérie d'abord, à l'essouflement ensuite, ."

tout à fait d'accord!

pas si facile de changer de vie .... surtout si on a des attaches familiales....

une illustration ,parmi d'autres....
http://tgtg.blogs.com/tgtemps/2004/05/i40_les_temps_m.html
http://tgtg.blogs.com/tgtemps/2004/05/i41_nos_temps_m.html
:-)

 
ImpasseSud
01-06-04 à 16:36

Re: Bonjour

Bonjour Vinzzz,
Ton histoire est très emblématique, avoir une sorte de pouvoir sur les autres, quoi de plus enivrant? Je trouve que notre société capitaliste est en plein délire. La capacité d'écoute étant de plus en plus rare, faute de temps, allait-elle laisser passer cette bonne occasion de faire de l'argent, ou celle encore pire, de croire d'avoir découvert "une idée miraculeuse"? Mais est-ce un gouvernement ou des lois qui peuvent mettre bon ordre à ces supercheries? Cela me rapelle un passage d'un petit bouqin italien de Massimo Fini, "Il vizio oscuro dell'Occidente" (2002):
"... Et donc, nous avançons, hilares, la vérité en poche et le soleil sur le front, sans incertitudes, sans hésitations, sans soupçons, sans resipiscences. Et si quelqu'un, ici en Occident, ose avancer des doutes à propos de la bonté du modèle, (...), il y a un crétin qui se lève et, les yeux injectés d'un sang illuministe, se met à hurler : "Pas question de revenir en arrière!". Bravo. C'est bien là le drame, idiot. Nous avançons, transportés par un mécanisme qui avance tout seul, grâce à une force autonome, sur laquel, depuis très longtemps, les épigones des apprentis-sorciers qui l'ont conçu ont perdu tout contrôle. Dociles comme des boeufs, bê:lants comme des brebis, aveugles comme des autruches qui ont enfoncé la tête dans le sable, nous nous laissons transporter par le courant et nous nous laissons emmener à l'abattoir sans réagir, sans nous opposer, sans même chercher une porte de sortie. C'est parce qu'il manque un courant de pensée qui pense la modernité. Pour la première fois dans l'histoire de l'Occident, du glorieux Occident d'Héraclite, de Parménide, d'Aristote, de Platon, de Plotin, des pères de l'Eglise, d'Augustin, de Thomas d'Aquin, d'Albert le grand, de Raymond de Pennafort, de Duns Scoto, de Bacon, de Leibniz, de Rousseau, d'Adam Smith, de David Ricardo, de Kant, d'Hegel, de Schopenhauer, de Marx, de Nietsche, de Heidegger, on ne pense plus aucun courant de pensée. Il n'y a plus aucune philosophie qui donne une orientation, il n'y a plus de philosophie, voilà tout. Il n'y a plus de philosophes. Aujourd'hui, on considère que Karl Popper est le penseur de pointe du monde occidental. Il a écrit : "J'affirme que nous vivons dans un monde merveilleux. Nous autres, Occidentaux, nous avons l'insigne privilège de vivre dans la meilleure société que l'histoire de l'humanité ait jamais connu. C'est la société la plus juste, la plus égalitaire, la plus humaine de l'histoire". Mais ici il ne s'agit pas d'un philosophe libéral, mais d'un domestique libéral : "tout va très bien,Madame la marquise"...

Il est vrai que l'homme d'aujourd'hui est terriblement seul et il ne sait plus quoi inventer pour avoir l'impression d'un contact avec les autres, aussi bien subordonné que suborneur. Cela rejoint, même si à moindre échelle, de façon beaucoup plus altruiste et moins vénale l'article que j'ai écrit ici

 
ImpasseSud
01-06-04 à 16:48

Re: Re: Bonjour

> pas si facile de changer de vie .... surtout si on a des attaches familiales....

Tgtg, je suis tout à fait d'accord avec toi. Mais si une situation insoutenable finit par vous conduire au divorce (il y a de plus en plus de violence familiale dans les familles de cadres), aux problèmes avec les enfants, aux ennuis de santé, à une vie avec des calmants ou des stimulants, le tout aboutissant immanquablement à un désatre financier.... je crois qu'il vaut mieux changer de vie quand il en est encore temps, plutôt que d'aller trouver un coach qui vous aidera à supporter tout ça.

Très sympathiques tes deux liens :-) Essayons donc de ne pas nous laisser manger par le système ! :-))

 
tgtg
01-06-04 à 18:02

Re: Re: Re: Bonjour

d'accord avec toi!!!

je ne ferais pas appel à un coach , mais certains hésitants , se sentant isolés ,ont besoin de coach dans certains cas , pour "changer de vie"
...

 
ImpasseSud
01-06-04 à 19:25

Re: Re: Re: Re: Bonjour

En fait, le but de mon article était surtout de condamner le système démentiel dans lequel beaucoup de cadres sont obligés de travailler, comme des esclaves de luxe au service du capital.
Quand des jeunes décident de faire des études supérieures, en général ils choisissent une branche qui les intéresse, et ils espèrent vivement pouvoir construire leur vie et (éventuellement) une famille sur ce choix. Alors pourquoi le système actuel les condamne-t-il bien souvent à faire des horaires impossibles, sans parler des prétentions de ductilité les plus invraisemblables, au détriment de leur famille et de leur vie privée, comme si, seul, leur emploi (qui bien souvent ne correspond même pas à ce qu'ils en attendaient, et en plus n'est pas plus sûr que ça) devait compter?
Ensuite, au lieu d'apporter des corrections au système qui, de toute évidence n'est pas fonctionnel et coûte cher à la société, on invente les coaches.... N'est-ce pas débile?

 
tgtg
02-06-04 à 00:10

Re: Re: Re: Re: Re: Bonjour

un "système démentiel" effectivement !
et pas uniquement pour les cadres :-(

 
ImpasseSud
03-06-04 à 08:30

Afin de vous couler dans le moule dès le départ!

Voir également cet autre article du Point :
Le coaching envahit les grandes écoles
Je suis tout à fait d'accord avec son auteur, Thomas Jan, quand il déclare que "le coaching est un tutorat qui ne dit pas son nom", et quand il pose la question finale :"A quand le coaching pour foetus?"

Moi, je trouve que c'est révoltant, et j'appelle cela de la violence psychologique, du lavage de cerveau! On va donc imposer ce tutorat aux élèves des grandes écoles, alors qu'étant majeurs, l'Etat les considère capables de se gérer, même s'ils ont parfois besoin d'un conseil (comme tout le monde d'ailleurs).
Quand je pense qu'ensuite, ces même personnes formées "en tutelle" décident par leur vote de l'avenir d'une nation!!!!!, j'en ai froid dans le dos.

Personne ne lit plus "1984" d'Orwell?