Si, tout comme moi, vous connaissiez la beauté de ces lieux, l'amphithéâtre de Scylla avec son éperon rocheux, ses eaux turquoises, cristallines ou bleu de prusse suivant la lumière, sa grande plage de sable gris, ses maisons adossées en espaliers aux premiers contreforts de l’Aspromonte couverts d'un maquis toujours vert, parsemé au printemps des taches jaunes des genets en fleurs, sans oublier son petit port; si, tout comme moi, vous étiez déjà allés sur la pointe sicilienne de Charybde, basse, sablonneuse avec ses villas blanches, son phare et son grand pylône désormais inutile mais qu’on laisse comme point de repère, serrée autour de ses deux lacs salés bordés de petits restaurants, vous banniriez à tout jamais cette expression désormais désuète de votre vocabulaire. Bien sûr, les écueils et les tourbillons redoutés par Ulysse sont toujours là, les vents ont parfois la voix d'un sirène, les courants de fond entre les mers Tyrrhénienne et Ionienne sont toujours aussi forts, surtout aux changements de marées et même par temps calme, mais désormais ils ne donnent du fil à retordre qu’aux voiliers qui, pour franchir le détroit de Messine, sont le plus souvent obligés de s’engager au moteur et toutes voiles calées. Les Italiens connaissent bien tout cela vu qu’ils ne tombent pas de Charybde en Scylla, mais « de la poêle dans la braise ».
Bref….. en français ou en italien, c’est cependant l’impression que j’ai éprouvée hier en apprenant l’élection de Benoît XVI. Aujourd’hui, je me sens comme après un choc ou un effort intense, atterrée, abattue, égarée, vidée, mais aussi découragée pour le monde des plus pauvres, des persécutés, des femmes qu’on va continuer à ignorer, juger, fustiger, mal aimer, sans toucher à l’autorité des puissants. Bien que non-croyante, c’est avec une telle tension, mais aussi avec un tel espoir que j’ai attendu la fin du règne de Jean Paul II !
Il va falloir continuer à supporter les fondamentalistes inspirés, l’intoxication des médias, l’arrogance des hommes politiques catholiques. Hier, le président du Sénat italien, Marcello Pera, a salué avec enthousiasme la « douceur » de Joseph Ratzinger ! Sa douceur ???????
Alors, je préfère retourner au confort d’un fauteuil, m’y lover tout au fond, fermer les yeux en essayant de ne plus penser, laissant entrer de plein fouet les parfums de la brise marine par les fenêtres grandes ouvertes, attendant que ce printemps tardif se décide à y ajouter celui des fleurs d’oranger.
Le « monde meilleur » que nous désirons tous vient encore de s’éloigner, mais moi qui ne manque de rien, qui mangerai demain, qui dormirai ce soir dans un lit douillet, qui n’ai jamais été battue, violée, emprisonnée, persécutée, qui n’ai jamais connu la guerre, les familles dispersées, les épidémies, la famine ou l’exploitation, qui n'ai jamais subi un génocide, une dictature féroce.... je devrais avoir honte de me plaindre.
Mots-clefs : Société, Religions, Europe, Méditerranée, Italie, Eau
Commentaires et Mises à jour :
Sans façons
Re: Espoir
Dans le reste du monde, il y a effectivement bien des endroits où les catholiques perdent des points comme en Afrique, en Amérique centrale, dans certains pays d'Asie et même en Allemagne (dixit Ratzinger), mais ce sont les Evangélistes, les Méthodistes ou l'Islam qui prennent leur place.
Re: Sans façons
L'indifférence n'est pas facile dans un pays foncièrement catholique.
Espoir