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Un été infernal ?

AlgérieNe pas prendre de vacances en été, pour moi ce n’est pas un problème. Entre ma terrasse sur la mer où nous prenons tous nos repas, la tranquillité du cul-de-sac qu'elle surplombe, la plage ou la montagne toutes proches et une circulation plus fluide en ville, le sacrifice n’est pas bien grand. C’est donc sans aucune appréhension que j’ai abordé l’été, même si, comme toujours en cette saison, le thermomètre monte un peu trop haut à mon gré. Mais cette année rien n’est pareil et on dirait que mon cul-de-sac s’est laissé envahir par le vent de folie qui souffle sur le monde. Tout d’abord mon voisin a refait son appartement de fond en comble et entre les martèlements, les perceuses et les scies circulaires qui, en plus du bruit et suivant le vent, m’envoyaient toute la poussière qui s’échappait des portes-fenêtres largement ouvertes, j’ai dû prendre mon mal en patience en me disant que plus on y travaillait, plus vite ce serait terminé. En effet, depuis une semaine le calme était revenu. Mais voilà que ce matin, une meute de gros engins a pris possession de mon cul-de-sac, avec l’intention de lui redonner un semblant de décor que les travaux pour le passage du méthane ont mis bien mal en point. Alors, entre niveleuse, recycleuse, aspirateurs, camions, marteaux piqueurs, poussière, chaleur humide, boucan d’enfer et sonnerie de recul, je me demande comment je vais faire pour résister. J’ai l’impression de revivre un évènement vieux de près de trente ans, au milieu du Sahara.

 

Autres temps, autres meurs, le Sahara était encore le Sahara, un lieu qu’on abordait avec crainte et respect, et à Tamanrasset ou à Djanet, il n'y avait ni aéroport ni camping. Il fallait y arriver avec des Lands Rover, sur des pistes défoncées ou tôlées qui, bien avant In-Salah, prenaient le relais de la route goudronnée, entre la soif, la chaleur, la poussière et les pannes, le téléphone arabe et l’extrême solidarité. La guerre d’Algérie était loin d’être oubliée, mais l’intégrisme islamique n’avait pas encore inventé sa cruauté. Ce matin-là, cependant, nous avions commis une erreur, empruntant pendant quelques centaines de mètres la traversée des Gorges d’Arak que des militaires commençaient seulement à asphalter...

 

On nous arrête immédiatement, nous retirant nos passeports et on nous ordonne de suivre une patrouille jusqu’à Arak, à 10 km de là, pour parler avec le commandant. La vallée que nous traversons est splendide, mais nous en profitons peu, la gorge sèche et la langue pâteuse au milieu d’un enfer fait de poussière, de pierres et de trous, le vent arrière projetant de grosses vagues de sable sur les deux lands devenues aveugles, nous obligeant même à nous arrêter pour nettoyer les vitres. Puis nous arrivons au camp militaire d’Arak où le commandant est intraitable. Clefs et passeports séquestrés, nous sommes donc immobilisés, sous un soleil blanc, aveuglant, indifférent, implacable, dans l’impossibilité de trouver la moindre fraîcheur dans les lands surchauffées, assis à même le sol, partageant à tour de rôle l’étroit espace d’ombre que les voitures nous fournissent, attendant avec résignation de connaître notre sort dans ce cadre dantesque. Nous avons tout notre temps pour observer les « caterpillars » à l’œuvre, ces monstres jaunes qui, non loin de là, poursuivent un travail incessant, dans les vapeurs nauséabondes du goudron brûlant, un nuage dense de poussière permanent, un bruit infernal renvoyé et amplifié par les parois rocheuses toutes proches. Au milieu de tout cela, les masques mortuaires des vivants se déplacent comme par enchantement, silhouettes presque diaphanes dans le mirage ambiant, ou collés sur leurs sièges et accrochés à leurs volants. Entre le fantasmagorique et l’opprimant, fatalistes dans une situation où il vaut mieux être prudents, nous perdons un peu la notion du temps.

Finalement, vers 17 h 30 on nous « libère ». Tamanrasset est encore à 380 km. A 17 h 45, une des lands tombe en panne. Une saleté s’est infiltrée dans l’essence et la pompe s’est désamorcée. Deux …. militaires qui passent par là s’arrêtent pour nous aider. Pendant qu’ils ont le nez dans le moteur au milieu d’un paysage qui vous coupe le souffle par sa splendeur, moi, je me laisse aller, envahie par la beauté de la solidarité innée….

(Cliquer sur la carte pour l'agrandir)

 

 

Hélas, il y en a encore pour quelques jours. Pour écrire ce billet, j’ai dû mettre des boules Quies. Mais cela a été l'occasion de ressortir mes photos et mon journal de bord, et j’ai fini par oublier les gêneurs, rêvant pendant quelques heures.

 

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Ecrit par ImpasseSud, le Mercredi 27 Juillet 2005, 14:43 dans la rubrique "Bribes perso".

Commentaires et Mises à jour :

alice
27-07-05 à 20:08

Courage!Le bruit et la poussière, on l'entend et on la sent dans ce billet...

 
ImpasseSud
28-07-05 à 07:12

Re:

Merci! J'essaie de me faire une raison, mais il y a des jours où l'enfer, c'est vraiment les autres.... :-))))

 
sophie
28-07-05 à 09:19

Ici aussi

Tiens ici aussi depuis deux jours, ils ajoutent de la poussière à la poussière en entâmant des travaux. Nê rêvons pas ! Pas la route mais de vagues préparatifs. Je sens qu'il est temps que nous ajoutions nos valises à la grande transhumance annuelle avant que je ne saigne trop du nez (je suis devenue allergique à la poussière).

Courage à toi :)


 
ImpasseSud
28-07-05 à 09:30

Re: Ici aussi

Allergique à la poussière dans les pays du sud ?!?! Cela doit te rendre la vie bien difficile. Moi j'ai preque (pas tout à fait) fini par m'en faire une raison. C'est ça ou rester les fenêtres fermées... ce que je ne supporte qu'en plein hiver.
Reste-t-il des endroits sur la terre où tout est parfait ?:-))))) Ou bien notre lot de mortel veut-il qu'il faille toujours combattre contre quelque chose ou le supporter?
En attendant, si tu pars, bonnes vacances!


 
ImpasseSud
29-07-05 à 11:37

Ça y est!

Après les tourbillons de poussière qui m'ont obligée à descendre les stores, après les vapeurs de goudron chaud qui empestent encore l'atmosphère et l'appartement, poussées par le mistral, mon cul-de-sac est tout neuf! Il ne me reste plus qu'à tout nettoyer.... et à espérer que...

A quand le prochain trou ?...


 
ImpasseSud
03-08-05 à 15:22

C'est reparti pour un tour!!!!

Alors que la chaleur torride persiste, à coup de perceuses et de poussière, on vient de commencer les travaux pour la colonne montante de l'eau. En plus, demain il est probable que nous serons sans eau.

Je vais finir par aller revendiquer un été de rechange!!!!