Le dernier billet de Robert Solé traite d'un sujet qui ne m’intéresse plus depuis qu’en France (comme en Italie) la gauche s'obstine à touiller dans la même soupe sans se décider à reconnaître qu’elle est définitivement surie et immangeable, soupe à jeter en somme et à refaire avec des ingrédients neufs. Il m’a cependant remis en mémoire une phrase de Shakespeare : « Ils ont échoué parce qu’ils n’avaient pas commencé par le rêve ».
Dormir n’est plus à la mode. Tous ceux qui nous dirigent ou gèrent nos destins, disent qu'il faut se lever tôt et veiller tard, prétendent que leurs équipes soient comme eux, de toutes les heures, de tous les jours, de toutes les disponibilités et flexibilités, présentes à tous les congrès, séminaires, réunions, rencontres, sommets, conférences de presse, à toutes les inaugurations, réceptions, déjeûners, soirées, premières, vernissages, etc., sans oublier la forme et le sport, et sous tous les fuseaux horaires à la fois. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles nous en sommes arrivés là où nous en sommes, car tous ces gens-là ne dorment plus(1). Parmi eux certains vous répliqueront qu’on a toute l’éternité pour dormir. Mais des rêves et des conseils que porte la nuit, qu’en est-il ? Car seuls ceux qui dorment réussissent à rêver.
« L’élève dormira six heures, qu’on en concède sept au paresseux, mais huit à personne » dictait, paraît-il, le règlement des écoles pythagoriques. Six heures : une sorte de minimum existentiel moyen en dessous duquel on commence à éprouver un mal-être et à avoir des difficultés à encadrer la réalité dans toute son ampleur et avec toutes ses composantes. N'est pas Napoléon qui veut. D'où les recours aux coups de pouce, sources de déconnexion.
Le fait est qu’aujourd’hui nous aurions certainement tous des nuits plus tranquilles si bon nombre des cocaïnomanes et autres utilisateurs de stimulants qui prennent des décisions de poids avaient dormi et dormaient un peu plus et mieux. Je ne sais pas vous, mais moi j'adore les idées fraîches, les solutions qui pointent leur nez au réveil, même quand celui-ci est un peu embrumé, de celles qui n'existaient pas encore la veille.
Commentaires et Mises à jour :
Re:
En écrivant ce billet, je pensais moi aussi aux nuits hachées ou blanches qui étaient les miennes quand mes enfants étaient tout petits, ou quand ils étaient malades, à l'état de nervosité, aux négligences et aux erreurs qui s'en suivaient. Quant à la passion de l'écriture, c'est vrai que quand on n'a pas des moyens assez grands pour pouvoir se permettre d'aller s'isoler quelque part, il faut prendre sur son sommeil, ne serait-ce que pour le silence et le calme relatifs de la nuit. Ta réflexion me fait penser à Marie Cardinal, qui dans "Les mots pour le dire" si je me souviens bien, raconte que seule avec ses trois enfants et en pleine crise dépressive, elle prenait encore sur ses nuits pour écrire.
Mais on ne peut quand même pas apparenter ces surmenages des mères (qui aujourd'hui prennent plus de calmants et de stimulants que nous n'en prenions) à "l'esclavage de syndrôme de Stockholm" auquel se soummettent volontairement tous les gens dont je parle, la plupart du temps tout d'abord pour satisfaire leurs soifs du pouvoir par personne interposée. Moi, je les trouve carrément dangereux et je les mettrais volontiers dans la catégorie des "sots zélés". Le néolibéralisme les a libérés et il n'y en a jamais eu autant dans toutes les sphères du pouvoir.
Merci pour la citation de Shakespeare.