Aux premiers grands titres de la presse on-line, vers 11 heures du matin, ma première réaction n’a été qu’un long cri muet que j’ai senti monter du fond de mes entrailles : « Y en a marre !!!!! ». Ce cri s’adressait à l’ensemble du système arrogant qu’on nous concocte et dans lequel on nous contraint à vivre (et pour certains à mourir), continuant à ignorer que « quiconque se sert de l’épée périra par l’épée ». Ma colère, cependant, est encore montée d’un cran quand j’ai appris que Tony Blair, avec le sourire resplendissant qu’il affichait depuis quelques jours, avait pratiquement effacé « la guerre en Iraq » de la liste des sujets à débattre au cours du G8 de Gleneagles, criant haut et fort, afin de faire le beau face à la requête populaire, que la pauvreté en Afrique serait la première des préoccupations des participants. Refusant catégoriquement de me joindre au chœur rituel et hypocrite qui n’allait pas manquer de s’élever sur notre belle planète pleine d’amour et de sens de la responsabilité, avec les mêmes « aujourd’hui, nous sommes tous Américains, Madrilènes, Londoniens », j’ai carrément cessé de m’intéresser à la question, car ce que j'en pense, je l'ai déjà dit ici et là. Que puis-je ajouter ? Moi, je ne me sens ni Américaine, ni Madrilène, ni Londonienne, mais l'habitante d’une planète qu’on met à feu et à sang pour les besoins d’hégémonie et de richesse de quelques-uns, quels que soient leur bord ou leur credo. Et puis, j’ai reçu ce message dans ma poste électronique :
« Au-delà de toute violence
Notre façon de voir est-elle vraiment si limitée que la seule pensée qui nous obsède est pour les victimes, ne laissant aucune place à toute autre considération ? Les nombreuses personnes qui, ce matin à Londres, ont commencé une journée qu’ils ne finiront pas, sont pour nous la vérité première et fondamentale de ce que nous avons entendu et vécu aujourd’hui. Bien loin derrière de cette vérité, nous trouvons des réflexions sur le G8 en cours, sur l’attaque envers un pays aussi fortement impliqué dans la guerre contre l’Iraq, sur les analogies avec les attentats terroristes à Madrid….
Nous, nous sommes profondément indignés par des déclarations telles que « nous ne nous laisserons pas intimider ! », car « la guerre contre le terrorisme continuera avec une plus grande vigueur », et pour finir « nous gagnerons »….
La répétition des mots déjà dits et entendus n’a plus rien de judicieux, ils sont vides et stériles vu qu’ils nous ont conduits face au spectacle auquel nous assistons aujourd’hui. Si nous continuons à nous considérer comme la partie de l’humanité qui est contre l’autre, nous alimentons un conflit infini, une séquence interminable faite de réactions et de contre-réactions, d’assassinats et de souffrances.
Il se peut que la douleur inspire plus de sagesse que ne le fait l’indignation. Pour les victimes du terrorisme et de la guerre, des bombes et des bombardements, la douleur est la même, elle ne varie pas selon les sujets qui l’éprouvent le plus directement.
Aujourd’hui, on a dit « nous sommes tous Londoniens », mais si nous nous sentons également « tous Iraquiens », « tous Afghans », ou « tous Tchétchènes », alors peut-être que nous finirons par entrevoir une orientation différente pour sortir de cette absurdité, un chemin inverse à celui qu’est la guerre infinie.
Pour vaincre le terrorisme, le seul parcours possible est de refuser toute violence. Le contraster par des moyens qui lui ressemblent est une voie sans issue. L’idée que nous nous faisons de l’humanité le suggère, et l’expérience nous l’enseigne tous les jours un peu plus. »
Signé Emergency*, 7 juillet 2005
(Traduction de l’italien par ImpasseSud)
*Emergency est une ONG qui s’occupe depuis plus de 20 ans des victimes de la guerre. Elle a commencé en Afghanistan, mais aujourd’hui, elle se trouve également en Iraq, au Cambodge, au Sri Lanka, en Sierra Leone, au Soudan, en Algérie et ailleurs.
Mots-clefs : Europe, Afrique, Asie, USA, Sujets brûlants, Iraq
Commentaires et Mises à jour :
Re: La douleur d'un Occidental vaudrait-elle plus que celle d'un Irakien ?
Je connais assez bien l'ONG dont je cite le message, qui combat depuis des années ce "deux poids, deux mesures". Les hôpitaux qu'elle a créés dans tous les pays que j'ai cités et parfois en plusieurs exemplaires sont aussi bien équipés que nos hôpitaux occidentaux (le dernier en date à Khartoum est hautement spécialisé en chirurgie cardiaque), car, pour citer Gino Strada, son fondateur et chirurgien lui-même, « On ne va pas dans le soi-disant Tiers-monde pour apporter un service sanitaire de Tiers-Monde. Un hôpital n’est satisfaisant que quand tu es disposé, sans aucune hésitation, à y hospitaliser ton fils, ta mère, ta femme ».
Quand tout le monde pensera de cette façon, il ne fait aucun doute que les choses commenceront à aller un peu mieux.
Re:
Même après hésitation, tu as très bien fait, ImpasseSud, d'ouvrir ton forum sur cette actualité marquante et révélatrice d'un monde, basé sur la loi du plus fort, qui est malheureusement transmise de père en fils!
Je suis du côté des plus faibles qui subissent courageusement cette violence, en essayant tant bien que mal de construire un monde meilleur à côté. Selon le viel adage " La violence appèle la violence" et le monde continue sa route vers sa destruction massive, car les armes seront de plus en plus meurtrière et sous toutes ses formes.
Moi aussi j'ai été sidéré par les propos des B² (Bush et Blair) responsables de la guerre en Irak où les morts sont bien plus nombreux que les WTC à New York et Londres réunis. Irak pays toujours occupé par les troupes de la coallition Anglo-américaine! Ces deux donneurs de leçons, avec un ton de sincérité mal placé, pronant la paix plutôt que le terrorisme. A qui s'adressaient-ils ? La télé venait de passer ces jours-ci, le film relatant la vie de David Kelly et son "suicide" lien , suite aux révélations sur la non existence des armes chimiques et de destruction massive en Irak, mettant en cause le gouvernement de Tony Blair en 2002. Comme le hasard est bizarre?
Dans l'escalade de la violence, il n'y aura jamais ni gagnant ni perdant, mais des morts par milliers dans le camp des co-latéraux qui n'ont rien demandé, et dont le seul tord est de mener une vie tranquille sur la trajectoire de leurs projectiles!
Quand on voit l'armada des forces militaires maritimes qui a été déployé, début juillet, pour célébrer les 200 ans de la victoire des anglais et de l'amiral Nelson dans Bataille de Trafalgar , on se demande si cela est encore utile face à des terroristes déterminés? C'est comme si on voulait écraser une puce avec un marteau! Rappelons-nous de New York, d'un côté l'armée la plus puissante du monde et de l'autre des fantômes suicidaires avec des cutter à 2 balles. L'Afganistan a été labouré de bombes en tous genres à coup de millions de $$ et B L coure toujours! L'Irak a subi le même sort et Z coure toujours!
En France on n'est pas en reste car on a mobiliseé la France entière pour faire libérer nos deux otages en Irak et à côté de ça, on laisse croupir Ingrid Bétancourt otage en Colombie depuis 3 ans sans mobilisation de masse!
""Moi, je ne me sens ni Américaine, ni Madrilène, ni Londonienne, mais l'habitante d’une planète qu’on met à feu et à sang pour les besoins d’hégémonie et de richesse de quelques-uns, quels que soient leur bord ou leur credo...""
Je partage entièrement ton sentiment, ImpasseSud, et je souhaite que notre "armée" pacifique aura le dernier mot quand les armes destructrices se seront enrayées!
Re: Re:
Merci Miss Lulu, merci Pierre pour votre intervention.
Pierre, un film en France sur le suicide de David Kelly, contre Blair, un film en Italie, au Canada et peut-être ailleurs en faveur de la Grande-Bretagne. Tout cela à la télé à la veille du G8! Coincidence ou manipulation? On finit par verser dans le machiavelisme.
On a fêté les 200 ans de Trafalgar? Mais les municipalités passent leur temps à organiser ce genre de commémoration et les gens à s'en réjouir... Ensuite, on crée des journées de la mémoire....
Quant à Ingrid Betancourt, si tout comme moi tu étais expat, tu saurais que la France renie toujours ses expats (plus de 6 mois pour refaire sa carte d'identité!!! Et que de bâtons dans les roues au niveau des consulats! Et la France métropolitaine qui ne reconnaît pas les documents émis par ses ambassades!, etc..), comme si nous étions des traîtres. Je viens juste de faire allusion à elle ici pour répondre à Miss Lulu qui me parlait de Garcia Marquez. Pour avoir une idée de ce qu'elle doit endurer, tu devrais lire « Journal d'un enlèvement », c'est vraiment très pénible.
Pour répondre à ta conclusion, moi je verse de plus en plus dans le pessimisme. Nous sommes pris dans une spirale où tout ne peut qu'empirer. Si tu as un moment, vas lire le commentaire que j'ai posté ici où Reza, un journaliste iranien de réputation mondiale, qui a créé une école de journalisme en Afghanistan après 2001, mais aussi d'autres journalistes dénoncent la reprise du pouvoir par les Talibans en Afghanistan.
Re: Re: Re:
Ta réponse m'éclaire sur la situation des "expats" et c'est vrai que les médias préfèrent parler des sans papiers, mais quelle différence finalement? Quand à ma conclusion jointe à la tienne, ce n'est qu'un souhait d'un optimiste comme moi, mais dont le point d'interrogation grandit au fil des évènements qui ne cessent d'apporter de l'eau sale au moulin de la désolation!
Chaque jour se lève sur une misère, grandissante comme le fossé qui se creuse entre les nantis et le reste du monde. Pas une info, pas un JT n'apporte de bonnes nouvelles. Le catastrophisme est pire que le Sida, car il n'aura aucun remède, vue que les news de l'horreur rapportent plus que les joies.
Pour ce qui est de l'affaire Joseph Kelly, j'ai retrouvé la source du film rediffusé sur mon île, il s'agit de la chaîne arte le 24 juin 2005 et chez nous c'était deux jours avant les explosions de Londres.
J'ai trouvé un dossier fort intéressant sur le Web dont les liens donnent la suite:
La guerre en Irak bâtie sur des mensonges
Pour ce qui concerne Londres, on tient la presse en haleine jusqu'à l'extraction des corps restés bloqués dans la rame de métro.
Ma question est:"Quand est-ce que le G8 donnera le feu vert, pour relancer l'économie mondiale, afin de répartir les richesses technologiques dans les pays qui en ont le plus besoin, pour qu'à leurs tours ils créent des emplois, afin d'inverser le flux des émigrés dans ces Eldorados devenus virtuels?"
à bientôt ImpasseSud :-))
Re: Re: Re: Re:
Pierre, tout d'abord merci pour ces liens que j'irai lire dès que j'aurai un moment car ils sont longs! :-)
Ta dernière question est la bonne, mais je crains qu'aucun G8 ne se la posera. Il faudra que ça parte d'autre part.
La douleur d'un Occidental vaudrait-elle plus que celle d'un Irakien ?
On croirait au vu du tapage médiatique, que nous accordons plus de valeur à nos vies d'Occidentaux qu'à celles des Afghans ou des Irakiens...