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Tremblement de terre à L’Aquila (27) : 15 mois après, le nouveau monde des Aquilani (2)... vu par un habitant de toujours

15 mois après le séisme du 6 avril 2009, comment vivent les habitants de L'Aquila ? Voici le second des récits annoncés le 23 juillet, un billet d’Enrico Macioci intitulé : « Cos'è L'Aquila oggi » (Ce qu'est L'Aquila aujourd'hui) où l’auteur commence en affirmant ses droits : « Je suis né à L’Aquila il y a 35 ans, j’ai toujours vécu à L’Aquila, j’étais à L’Aquila le 6 avril 2009 à 3h32, j’étais avec l’océan d’Aquilani à la manifestation du 16 juin dernier à L’Aquila (dont personne n’a parlé), j’étais avec les milliers d’Aquilani de la manifestation qui a eu lieu à Rome le 7 juillet (dont on a dit du mal), et c’est à L’Aquila où j’habite encore que j’écris ces lignes. Tout cela me donne le droit de témoigner en connaissance de cause sur ce qu’est devenue L’Aquila en près d’un an et demi. »

 

« Nous, Aquilani, nous avons été les protagonistes involontaires, - et jusqu’à présent en partie inconscients -, du summum démonstratif de la force, de l’influence et de la capacité de distorsion que les mass-médias aient jamais atteint en Italie. Un pouvoir d’autant plus maléfique qu’il est sournois, d’autant plus invincible qu’il est oblique et, en définitive, vil. Il m’est impossible de qualifier d’une autre manière une divulgation sciemment vouée au mensonge ou, encore pire, à l’instrumentalisation du drame. Une trahison des droits non pas simplement civils, mais réellement et profondément humains, et donc une trahison de nous tous dans notre intégrité et notre besoin de justice et de vérité. La déformation plus ou moins éclatante de la part de bon nombre de moyens d’information, de la manifestation du 7 juillet à Rome, n’est que le dernier morceau d’un puzzle que je ne sais pas comment définir, diabolique ou ridicule – bien que ces acceptions, à un certain point se touchent jusqu’à s’encastrer.
Moi, le 7 juillet, j’y étais, j’étais à quelques mètres des policiers et carabiniers, au milieu de mes concitoyens, et bien que j’aie une conscience lucide du pays dans lequel je vis, je n’ai pas pu m’empêcher d’éprouver une grande amertume face aux nombreux JT du soir et autant de journaux du matin suivant. J’ai eu l’impression d’être déridé, trompé, - qu’on me permette d’utiliser un mot fort -, poignardé. Quel autre type de réaction devrait avoir un libre citoyen d’une démocratie moderne quand dans cette démocratie on ne lui permet pas d’exposer ses nécessités les plus urgentes sans qu’il doive se heurter à un corps de garde ? Quand le contact avec les autorités de ladite démocratie est cassé par les canaux de l’audition ? Quand l’éloignement physique est la règle à laquelle il faut soumettre celui qui a quelque chose de pacifique mais ferme à objecter ? Jamais comme au cours de ce 7 juillet, je n’avais éprouvé la nette sensation de la distance fatale qui sépare l’individu et les autorités, du décalage douloureux entre nous dans la rue et eux derrière les volets clos et inaccessibles de Palazzo Chigi [siège du gouvernement, ndt], Palazzo Grazioli [habitation de Berlusconi, ndt] et Palazzo Madama [siège du Sénat, ndt].


Avant le séisme, L’Aquila était une ville magnifique basée sur une osmose parfaite. Le cœur battant de la communauté était le centre historique, là où se déroulait 95% de la vie sociale, là où naissaient les commerces, les bureaux, les cafés, les grands et les petits restaurants, les pizzerias, les pubs, les stands, les places, les lieux de rencontre, de distraction, les manifestations culturelles, les cinémas, le théâtre, les orchestres, là où la jeunesse locale et les étudiants passaient leur temps libre, tout comme les familles, les enfants, les personnes âgées. Ce centre était vaste : en partant du Parc de la Forteresse espagnole on pouvait continuer à marcher avant d’arriver aux tilleuls de la Villa Communale[jardin public, ndt] ou, encore plus bas, jusqu’à la débauche d’herbe et de marbre de la Basilique de Santa Maria di Collemaggio et du Parco del Sole – en traversant entre-temps le Corso vecchio et le Corso nuovo, les Quattro Cantoni et les portiques, et en côtoyant Santa Maria di Paganica e Piazza Palazzo, San Bernardino et Santa Giusta, Piazza Duomo et Costa Masciarelli, puis les innombrables ruelles, coins, cours, clochers, fontaines, placettes, églises, les parcelles magiques d’un temps révolu arrivé intègre jusqu’à nous malgré une histoire tourmentée.

Maintenant on peut parcourir aussi bien le Corso vecchio que (depuis quelques semaines ) le Corso nuovo, muté cependant en un boyau le long duquel les images des photographes, immobilisées par ce 6 avril 2009, pâlissent en un triste et métaphorique adieu : les vitrines sont aveugles, les touristes armés de matériel digital et vidéo caméra reprennent sans se lasser les fragments déséquilibrés d’une ville en morceaux, où les Aquilani, quand on en rencontre, ne parlent que de résidence principale, résidence secondaire, zone rouge, emprunts, adjudications, permis, papiers, loyers, arrangements autonomes ; et où, pour finir, les appels de la population écrits sur des feuilles volantes sont attachés aux grillages qui entourent les étayages, semblables à des condamnés à perpétuité avec les doigts à travers les barreaux. Le reste ? Tout est fermé, enseveli sous des millions de tonnes de gravats qui n’ont toujours pas été évacués, putréfié par le froid et la chaleur, le soleil et la pluie, la neige et l’air étouffant. Tout est sous clef dans de gigantesques barres d’acier. Encapuchonné, emprisonné, empaqueté, mis en sécurité, c’est comme ça qu’on dit, mis en sûreté.

Au cœur battant du centre historique répondait la périphérie, en un contrepoint impeccable par sa simplicité et son efficacité : pas particulièrement belle mais ordonnée, pas très très propre mais décente, pas attrayante mais tout autre que repoussante ; pas minuscule mais pas énorme non plus, à mesure d’homme, tranquille, tachetée de vert, les montagnes penchées sur elle comme des géants bénins et curieux. Mais voilà que l’évacuation du centre historique, justement, a été rejetée sur la périphérie, en la transformant en cette ruche confuse et aliénante qu’elle est en train de devenir, qu’elle est déjà devenue : un trafic affolé, des kilomètres de queues, la dispersion des services, des baraques qui poussent n’importe où (une authentique épidémie de baraques), et, partout, le mètre, le décimètre carré qu’on arrache à la terre, pour pouvoir affirmer, dans un débordement équivoque et délirant de vie : moi, j’y suis, vous me trouvez là, moi, je suis là.

Et au-delà de cette nouvelle périphérie – qui entre temps est devenue le centre -, la toute nouvelle périphérie, qui est donc la véritable périphérie actuelle : il y a ceux qui l’appellent Progetto-C.A.S.E., d’autres Modules et d’autres encore new-town (sans doute de façon plus appropriée). Elle consiste en 19 groupes d’immeubles, loin de la ville (c’est-à-dire de l’ancienne périphérie devenue le centre 1-2-3) et les uns des autres, sans commerces ni lieux d’agrégation, où celui qui n’a pas voiture s’en remet aux horaires des bus ou se résigne à passer sa journée dans un appartement qui n’est pas le sien, parmi des gens qu’il ne connaît pas, trompant le temps comme peut le faire un hôte astreint à une échéance indéterminée : une greffe d’humanité dans les règles, qui pouvait et devait être réduite du point de vue de la quantité et raccourcie dans la durée. Dans les new-town, il y a des milliers de personnes, mais là où certains voient dans les chiffres une raison de se vanter – la société tout entière est en train de se réduire aux chiffres, avec ce qu’un concept de ce genre implique de glacial et de féroce -, je vois certaines réalités incontestables : isolement, aliénation, ennui, dépression, colère, frustration, anxiété, coercition, névrose. Il est clair que le viol urbanistico-géographique – qui fait que le centre a été transfusé en périphérie et la périphérie a été transfusée dans une ultra-périphérie -, implique un prix à payer du point de vue typiquement humain : une société ne peut pas faire abstraction de la terre sur laquelle elle jette ses fondements, ni des méthodes qu’elle a élaborées pendant des siècles pour s’y rapporter. Le conjoint, le meilleur ami, les parents, la famille, les connaissances comme les visages vaguement connus, contribuent à pétrir l’existence et la personnalité de chacun d’entre nous. Et tout de suite après il y a les lieux, le café du coin, le boulanger, le coiffeur qu’on aime, le dentiste, l’oculiste, le snack, la bibliothèque où on connaît untel et la salle d’étude où on connaît tel autre ; et puis encore le trottoir où on a usé ses semelles pendant des heures, la colonne où on s’appuyait pour fumer, et puis le porche, le banc, le tronçon de route, le pavé, l’air. Les endroits aussi respirent, et l’air d’un endroit n’est jamais identique à l’air d’un autre endroit, et encore moins à l’air de ce même endroit violé, déchiré puis transféré, arraché de force.

 

Pendant que le Gouvernement est en train de décider si les Aquilani doivent recommencer à payer leurs impôts à 100 % et immédiatement ; pendant que le Chef de ce gouvernement continue à répéter qu’à L’Aquila il a accompli un miracle jamais advenu dans l’histoire des désastres naturels, que le pire est derrière nous et que le ciel est de nouveau serein ; et pendant que l’opposition ne sait rien faire de mieux que de suivre le chef de ce gouvernement sur le même terrain qui ne mène nulle part, relativisme et discours creux, je tiens à souligner un dernier concept : le concept de futur. Dans une société globalisée qui court toujours plus vite – même si ce n’est pas forcément plus avant -, où le travail est toujours plus mobile, rapide et souverainement incertain, où les relations se liquident et se pulvérisent, je me rends compte que prétendre un futur peut sembler quasi pathétique. Pour un exécutif qui brandit l’étendard de l’action, le fétiche ambigu mais idéologiquement robuste de l’efficacité, il s’agit de concepts fumeux, carrément agaçants, une espèce d’éternuement au milieu d’un silence dévot.

Au Parlement, un député a affirmé que ceux qui devraient aller protester à L’Aquila, ce sont eux, les hommes politiques, après tout ce qu’ils ont fait pour nous et dont nous, nous ne nous sommes pas même rendu compte. Il n’est que trop clair que celui qui parle ainsi raisonne une fois encore en partant des chiffres. Mais les chiffres, contrairement à ce qu’on pense, sont corruptibles, il est facile et commode de les tirer vers son propre bord avec un peu de rhétorique, de culot et d’inconscience. Les chiffres sont contestables, surtout quand ils sont dans les mains de ceux qui les fournissent. Dans la bouche de celui qui détient le pouvoir, les chiffres peuvent très bien se changer en caprices.

 

Alors, moi j’en reviens au concept de futur parce qu’il s’agit d’un concept qui n’est ni monnayable ni passible de sondages, parce que l’être humain se nourrit de futur, parce que l’être humain doit pouvoir se dire à soi-même, chaque jour et à chaque instant : demain je ferai ceci, après-demain j’essayerai cela. Sans que de tels auspices soient automatiquement une garantie de succès, mais dans l’espoir rationnel de pouvoir au moins les énoncer, de pouvoir y penser, d’en avoir le droit.

 

A L’Aquila, le futur n’existe plus. A sa place, il y a le chaos bureaucratique, les imprécations, les protestations, les ressentiments et la confusion. Les générations âgées, incrédules et finies dans un mauvais rêve presque impossible à raconter, dans un cauchemar poisseux et boueux qu’aucun mot, aucune promesse ne peut laver, se réfugient dans le passé et donnent l’impression de s’évanouir comme des fantômes. Les générations suivantes ont peur de devoir chercher dans la fuite une nouvelle possibilité qui ne les diminue pas de moitié. La nouvelle génération se traîne entre une situation scolaire et relationnelle difficile et la très longue file des bars qui ont poussé furieusement le long de la Viale della Croce Rossa, l’une des principales artères du trafic diurne et nocturne, pleine de phares, de fumée et de klaxon.

Nous sommes en train de nous habituer à cohabiter avec l’indistinct, le nébuleux, les on verra, les si seulement, les va savoir. Nous sommes en train de devenir ontologiquement irrésolus. A l’époque de la précarité, nous sommes des précaires par excellence et notre faute est mesurable au fameux 6,3 de l’échelle de Richter. Une société soi-disant civile, une démocratie moderne nous pousse sur le bord d’un précipice existentiel où non seulement on ne sait pas ce qu’il en sera de nous, mais pas même comment, ou pourquoi, ou pour qui, ou quand, ou si. Alors qu’il me semble que là-haut même le Gran Sasso frémit au-dessus des bois, quand le soir venu le soleil descend. »

Enrico Macioci, "Cos'è L'Aquila Oggi", publié sur Nazione Indiana le 13 juillet 2010
(Traduction de l'italien par ImpasseSud : le texte original ne comporte aucun des liens-photos que j'y ai ajoutés pour une question de clarté).


Tous mes billets sur le Tremblement de terre du 6 avril 2009 à L'Aquila

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Ecrit par ImpasseSud, le Vendredi 30 Juillet 2010, 14:29 dans la rubrique "Actualité".

Commentaires et Mises à jour :

PierreDesiles
30-07-10 à 22:20

SOS à l'AQUILA !

Merci, ImpasseSud, pour cette traduction qui relate au plus juste ce que vivent les aquilani, par Enrico Macioci. Il est clair que c'est un chantier colossal, mais rien n'empêche son lancement, et priorité aux logements des habitants. Quelle claque cinglante lorsque l'Etat parle d'impôts aux aquilani, eux qui devraient en être affranchis jusqu'à leur retour sur leur terre reconstruite! Y a t-il eut des experts internationaux pour évaluer le temps d'un retour des habitants après une reconstruction possible de leur quartier? Combien de camions de gravats faudrait-il enlever ? Je pense que oui, mais que tout cela n'est pas suivi des faits concrets. On parle de chômage, mais au lieu de payer des gens à ne rien faire dans les pays voisins, offrons leur la possibilité d'aider les aquilani à revenir chez eux en ouvrant des chantiers contrôlés et adaptés aux besoins. Beaucoup d'italiens eux mêmes seraient prêts à y participer si le gouvernement voulait bien prendre les choses en main, mais il faudrait pour cela beaucoup d'imagination et d'utopie pour y croire !

Tant de milliards sont engloutis dans des guerres sans fin au siècle de la conquête spatiale, et aucun élan mondial pour venir en aide à ceux qui ont tout perdu dans des catastrophes naturelles et qui n'avaient rien demandé! Mais que fait et à quoi sert l'ONU ???

J'ai pensé aux aquilani, en voyant Poutine aujourd'hui à la télé:""Le premier ministre Vladimir Poutine s'est rendu dans le village de Verkhniaïa Vereïa de la région de Nijni-Novgorod (est de Moscou), dont la totalité des 340 maisons ont été ravagées en 20 minutes par les flammes. Les habitants de cette ville combattaient le feu avec des seaux d'eau et tentaient de sauver quelques meubles. La télévision russe a montré des villageoises entourant Poutine pour lui demander si le gouvernement allait financer la reconstruction de leur maison. "Ne vous inquiétez pas. D'ici cet hiver, le village sera reconstruit, je vous le promets", leur a répondu le chef du gouvernement.""

Je pense que cette phrase là, les aquilani l'ont aussi entendu en 2009 malheureusement.

Ce village n'est pas à comparé avec l'Aquila évidemment. Cette superbe ville historique dont tes liens multiples m'émerveillent, et que je regrette de n'avoir pas connu auparavant, mais qu'en reste t-il ?


 
ImpasseSud
01-08-10 à 17:59

Re: SOS à l'AQUILA !

Pierre, merci pour toutes ces questions qui me permettent de répondre à ceux qui se les posent en lisant mes billets. Je vais essayer de procéder par ordre :


Les impôts : comme d’habitude et une fois de plus, le gouvernement aurait promis « en paroles » que tout est arrangé et que les sinistrés de L’Aquila seront traités comme ceux de l’Ombrie de 1997. En attendant,  et vu que ça fait des mois qu’à chaque fois que le ton monte, il fait des promesses sans suites, alors attendons de voir pour y croire.

Les gravats : Il s’agit de 4 à 5 millions de m3. A part ce qui a été évacué en mars par le peuple des brouettes, et l’esbroufe médiatique du gouvernement qui a fait débarrasser une place au Caterpillar et repéré trois carrières, il semble que le rideau soit tombé sur la question et il m’est très difficile de savoir ce qu’il en est exactement. Les habitants de L’Aquila disent et répètent que les gravats sont toujours là, que quand un tas disparaît c’est simplement parce qu’un autre tas a augmenté de volume. Le fait est que les habitants de Paganica7 km de L’Aquila, touchée par le séisme et avec des HLM-CASE aux égouts pas terminés) protestent car après avoir mis une carrière à disposition, il semble qu’on voudrait la multiplier par dix, au préjudice, dans ce paysage agreste, de l’environnement, du réseau routier, d'activités touristiques et de la santé. Donc à suivre là aussi.

Le chômage : ta proposition, on ne peut plus logique, rejoint celle que le Peuple des brouettes avait faite dès le 7 mars, mais elle n’a eu aucun écho.

Les experts internationaux : là, il y a deux aspects de la question.
1) L’UE avait tous les pouvoirs pour jouer le rôle d’expert, financier tout du moins, vu qu’elle a déboursé 497 millions d’€. Cette somme aurait permis de reloger les 65.000 sinistrés. Bernenous n’en a relogé que 15.000, a payé 3 fois leur prix sur le marché les préfabriqués-HLM-CASE et l’UE qui prétend contrôler chacun de nos moindres gestes a envoyé une commission d'experts qui a trouvé... que tout allait bien !!!!

2) En Italie où on a une expérience notable en matière de tremblements de terre, ce qui manque, ce ne sont pas les experts, mais le sérieux et l’honnêteté dans les administrations publiques et le monde de la construction où, trop souvent, règnent la corruption et l’infiltration mafieuse. Comme je l’ai raconté dans le paragraphe 4 de mon billet n° 22, pour reconstruire L’Aquila, l’Italie a tous les grands hommes qui lui faut, entre Renzo Piano, un des plus grands architectes au monde, qui en avril dernier avait fait des propositions concrètes, antisismiques et économiques (il faudrait que je traduise ce texte), Massimiliano Fuskas qui dès le mois d'avril 2009 s'était déclaré contraire à la construction des "new-tows" chères à Berlu, Giuseppe Campos Venuti, etc... Le problème, c’est que tous ces gens-là appartiennent à un autre monde que la clique de Bernenous, qui, il faut le savoir, a commencé sa carrière comme entrepreneur en bâtiment douteux et qu’il le reste dans l’âme, réservant tous les grands travaux à la Protection civile à qui il a donné le pouvoir d’agir en dehors des lois (1) et qui ne répond qu’au Président du Conseil, c’est-à-dire à lui-même.

En résumé, il semble bien que la reconstruction de L’Aquila, Bernenous ne veuille la céder à personne et qu’il ne veuille aucune ingérence, quelle qu’elle soit. En plus, il semble que la seule chose qui compte pour lui, ce n’est pas la récupération d’un patrimoine artistique et historique extraordinaire, mais ce que ça pourrait lui rapporter. Evidence confirmée par sa dernière sortie d’avant-hier, du genre : « Ce n’est pas vrai que les caisses sont vides, il y 13 milliards d’€, et vu que les administrations locales ont démontré leur incapacité à faire partir la reconstruction, je vais renvoyer la Protection civile, comme ça c’est moi qui y gagne ! » Une belle partie de poker après que la Protection civile ait laissé 200 millions d’€ de dettes à son départ en février, et que les caisses de la région des Abruzzes, de L’Aquila et des communes du « cratère » soient remplies dès le début aux promesses de capitaine et aux parties de cache-cache.

A L'Aquila, comme tu peux l'imaginer, on est de nouveau sens dessus dessous : "L'Aquila n'est pas Kaboul! Une nouvelle occupation se profile à l'horizon." s'écrit le maire qui en appelle au Président de la République Napolitano. "Il ne faudrait pas que Berlusconi s'imagine qu'il va se refaire une beauté une seconde fois sur notre tragédie ! ", s'écrit son adjoint. Stefania Pezzopane, ex- présidente de la Province de L'Aquila a déclaré : " La reconstruction de L'Aquila doit vraiment être confiée aux Organismes locaux en leur attribuant des ressources certaines et continues. Pour la reconstruction, une loi spéciale est nécessaire avec des ressources et des procédures claires. Que fait le gouvernement, au contraire, en pleine folie et délire d'omnipotence ? Il prive d'argent les organismes locaux pendant 6 mois, les contraignant ainsi à protester. Quand, grâce à la mobilisation on libère quelques ressources, le Président du Conseil, qui confond L'Aquila avec une république des bananes, annonce le retour des siens. Il est évident qu'il s'agit d'une stratégie contre laquelle il y aura une grande mobilisation car le dessein qu'il a prémédité est de vider les organismes locaux, vider les caisses et mettre la main sur la reconstruction".

 

Pour en venir à l’histoire de l’incendie du village russe, tu as raison, la phrase de Poutine, c’est du copier/coller de Berlu qui la ressort à chaque catastrophe. Ces deux-là sont cul-et-chemise, la puissance du premier étant compensée par la richesse sans confins du second. De toute façon l’histoire est de bien moindre importance. Espérons donc que les 340 isbas seront vite reconstruites. Avec de la bonne volonté et du préfabriqué, ne pourrait-on pas reloger tout le monde avant la fin de l’été ? Ou bien Poutine fera-t-il comme Berlu en dispersant la population ici et là et rompant le tissu social ?

 

En réponse au reste, j’aurais tant à dire mais peut-être qu’au contraire il n’y a plus rien à dire au-delà des chiffres comme l’écrit Enrico Macioci. Le parlement italien vient d’approuver une manœuvre économique de restrictions de 25 milliards d’€, mais l’Italie qui « répudie la guerre » de par l’art. 11 de sa Constitution vient d’acheter 29 milliards d’€ d’armes. 25, 29, 13... faut-il encore espérer quelque chose dans un pays où les milliards disparaissent, apparaissent, ne sont plus que menue monnaie, un « caprice dans les mains de ceux qui ont le pouvoir » ? Heureusement qu’en France on s’émeut encore des 150.000€ de l’affaire Bettencourt.


(1) En 2003, Berlusconi a fait un décret qui autorise la Protezione Civile italienne (qui ne répond qu'au Premier Ministre) à s'attribuer tous les pouvoirs extraordinaires qu'elle juge nécessaires dans les cas déclarés "d'urgence". Ces cas dits "d'urgence" comprennent non seulement les catastrophes naturelles, mais aussi les grands travaux et les grands évènements, et peuvent être déclarés sur mesure. Ce qui, d'un côté, permet aux requins de toutes sortes d'agir en dehors des lois, et de l'autre, autorise le Premier ministre et la Protezione civile à priver les populations concernées de l'état de droit sur une simple décision.


 
ImpasseSud
04-08-10 à 18:47

Du pareil au même

A propos des incendies en Russie dont je n'avais pas bien saisi l'ampleur : cet article a éclairé ma lanterne : Vladimir Poutine, pyromane et pompier. Comme ils se ressemblent, ces deux tristes sires ! Le même mépris de l'Etat, des instritutions, des structures et des populations, avec pour seul but une soif insatiable du pouvoir dissimulée sous une propagande électorale en continu. Pierre, un rapprochement parfait ! 
De toute façon, en Italie, les médias n'en parlent pas beaucoup et d'une façon plutôt neutre. Ce n'est pas surprenant.