L’Aquila s’est déplacée de 15 centimètres. Rien d’étonnant à cela, la Terre a ses lois ballerines, elle est vivante, en Italie bien plus qu’ailleurs (carte) et tout le monde le sait. Mais l’incurie de tous ses gouvernements, les uns après et comme les autres, sans distinction de couleur politique, leur peu de considération de ses habitants, leurs manques de conscience et de sens des responsabilités, leurs vénalités criminelles, leurs lâchetés et leurs silences face aux spéculations, leurs mensonges, le culte du clientélisme et la culture de la corruption, sans oublier leurs mépris du patrimoine extraordinaire dont ils ont hérités, ont-il un équivalent dans notre monde occidental, soi-disant civilisé, à l'avant-garde ?
Pour l’instant, je suis tellement bouleversée par les conséquences, soi-disant impossibles, du tremblement de terre du 6 avril (photos), avec un nombre de morts qui ne peut qu’augmenter vu que tout le monde s’est bien gardé de faire état des sans-papiers logés dans les caves semi-enterrées du centre ville (1 en it.) ;
tellement furieuse et scandalisée par la tromperie des constructions publiques et privées faussement antisismiques (2 en it. -2a en fr.), responsables du plus grand nombre des victimes ;
tellement accablée par l’abondance de mièvreries politiques, de paroles édifiantes, de poignées de mains et de larmes à l’œil m'as-tu-vu ;
tellement ecoeurée par les prises de positions offusquées face aux critiques qui mettent à nu, malgré toute la bonne volonté déployée, les terribles carences de la Protection civile italienne en matière de prévention, d’organisation et de fonds à disposition, malgré les 6 mois de secousses et de signes précurseurs (3 en it.) ; ainsi que l'absence totale de préparation spécifique des corps d'armée.
tellement ulcérée par la récupération religieuse de la douleur d'une indécence révoltante et par l’habituel jeu des médias ;
tellement choquée par le fait que près d'une semaine après la catastrophe et malgré tout le volontariat sur place, les principaux camps de tentes de L'Aquila sont encore sans eau, sans électricité, sans chauffage, sans direction coordinatrice ou centres d'information, et que certaines fractions de la périphérie n’ont encore reçu aucun secours offficiel ;
tellement atterrée et tellement peinée par le très long calvaire (mois ? années ? plus de dix ans ? dizaines d'années ? (4 en fr., 5 in engl.)) qui, comme après chaque séisme destructeur en Italie, quand la fièvre de la solidarité est retombée et dans le plus grand inconfort et la promiscuité, attend la foule pleine de dignité et de réserve des dizaines de milliers de rescapés sans-abri qui ont absolument tout perdu,
que je n’arrive plus à penser à autre chose, à m'intéresser à autre chose, à parler d'autre chose. Car, ici au sud, c’est ce qui attend désormais la population dans les immeubles mal construits après 1970 (lesquels?), mais que, jusqu’au 6 avril on croyait antisismiques.
Les vœux que j’ai reçus ce matin pour Pâques ont cependant réussi à me distraire quelques instants :
Joyeuses Pâques à tous donc... pour ce qu'il reste de cette journée avec
« Sorella Terra »
(« La primavera in anticipo » - le printemps en avance)
de Laura Pausini.
Sorella terra, ascolto te
ogni conchiglia oceano è
e poi, ogni foglia è un battito
che sa, vibrare all'unisono con noi
se vuoi
sorella terra, che pace dai
coi tuoi deserti e i tuoi ghiacciai
così sento nel mio spirito, di te
quell'infinito anelito, perchè
le tue foreste
sono il mio respiro, sai
e non è più terrestre l'emozione che mi dai
che mi dai
così, fino a perdermi
nell'armonia celeste, di quest'estasi
ma guardarti a volte che male fa
ferita a morte dall'inciviltà
così, anch'io divento polvere, e mi disperdo
dentro un vento a raffiche, perché
le tue foreste sono il mio respiro, sai
e non è più terrestre l'emozione che mi dai,
che mi dai
così, fino a perdermi, nell'armonia celeste di
quest'estasi
La Terre ne devient une ennemie que quand on refuse de l’écouter ou qu’on la maltraite. Les voeux que je forme aujourd'hui, c'est qu'on le comprenne, finalement, que les habitants des Abruzzes puissent trouver le courage qui leur est nécessaire pour reprendre le cours de la vie, mais surtout que les autorités ne les oublient pas et activent la reconstruction d'une façon consciencieuse, exempte de toute spéculation.
Tous mes billets sur le Tremblement de terre du 6 avril 2009 à L'Aquila
2 : Les risques de la reconstruction
4 : Avant et après
5 : Sur la scène et dans les coulisses
6 : L'éclosion des petits malins
8 : Là aussi on vote... malgré tout
9 : Ce qu'aucun JT italien ne raconte
10 : Les Aquilani en colère vont protester à Rome
11 : A trois mois du séisme vers les Sommet du G8
12 : La parade du G8 à son apogée et les réponses des Aquilani
13 : L'erreur d'Obama
14 : Les Aquilani plus isolés que jamais
15 : Vu de loin
16 : La grande confusion
17 : 6 mois après, cahin-caha, mais toujours en dépit du bon sens
19 : Manoeuvres électorales sur Wikipédia
20 : Un dimanche après l'autre et à la barbe des instrumentalisations, le tissu social de la ville se reconstitue
21 : Un an après !
22 : Un an après, le bilan
23 : Deux films qui racontent la réalité du post-séisme
24 : Vers une Union européenne de sinistrés
25 : 15 mois après, les Aquilani sont toujours sinistrés, abandonnés leur sort et... matraqués
26, 27 etc.... toute la suite ici
Mots-clefs : Italie, L'Aquila, Europe, Planète Terre, Occident, Immigration, Médias, Sujets brûlants